Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/37

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Quelquefois la méchante vieille descendait de son poêle, appelait le chien de garde en disant : « Ici, ici, petit chien ! » et assenait de grands coups sur la maigre échine de la bête ; ou bien elle allait se poster sous l’auvent et aboyait, selon l’expression de Khor, à tout venant. Mais elle redoutait son mari et, dès qu’il parlait, elle regrimpait prestement sur son poêle. Ce qu’il était curieux d’entendre chez Khor, c’étaient ses discussions avec Kalinitch sur la personne de M. Poloutikine.

― Voyons, Khor, ne le touche pas, disait Kalinitch.

― Et pourquoi ? Te donne-t-il des bottes ?…

― Des bottes à moi, un moujik !

― Eh bien, moi aussi, je suis un moujik, et pourtant, vois. Et, tout en parlant, Khor montrait à son camarade son pied chaussé d’une botte en cuir de mammouth.

― Ah ! tu n’es pas un moujik comme les autres, répondait Kalinitch.

― Au moins, que ne te donne-t-il des laptis ? Tu vas tous les jours à la chasse avec lui et il te faudrait une paire de laptis par jour.

― Il me donne de quoi acheter des laptis.

― Ah ! oui, il t’a donné un grivennik[1] l’année dernière.

  1. Dix kopeks.