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Page:Tourgueniev, Terres Vierges, ed. Hetzel.djvu/322

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— Il s’est pendu.

— Quand cela ?

— Peu importe le moment ; mais c’est une mauvaise affaire. »

Kalloméïtsef haussa les épaules et s’écarta du côté de la fenêtre avec un dandinement nonchalant.

L’aide de camp rentra, accompagné de Markelof.

Le gouverneur avait dit vrai : Markelof était extrêmement calme. L’air morose qui lui était habituel avait même disparu de son visage, pour faire place à l’expression d’une sorte de fatigue indifférente.

Son expression resta la même quand il aperçut son beau-frère ; pourtant, lorsqu’il eut jeté un regard rapide sur l’aide de camp allemand qui l’avait amené, on aurait pu voir briller dans ses yeux une dernière étincelle de la vieille haine que cette classe de gens lui inspirait.

Son paletot était déchiré en deux endroits et négligemment recousu avec du gros fil ; sur le front, les sourcils et la racine du nez se voyaient des écorchures, des traces de sang coagulé. Il ne s’était pas lavé le visage, mais il avait peigné ses cheveux. Les deux mains profondément enfoncées dans ses manches, il s’était arrêté près de la porte. Il respirait régulièrement.

« Serge ! lui dit Sipiaguine d’une voix émue, en faisant deux pas vers lui, et en tendant la main juste assez pour le toucher — ou pour l’arrêter s’il se portait en avant : — Serge, je ne suis pas venu ici pour t’exprimer notre surprise, notre profond chagrin, car tu n’en pouvais pas douter ! — Tu as voulu toi-même te perdre, et tu t’es perdu ! — Mais j’ai désiré te voir pour te dire… te faire… hum… hum… pour te donner la possibilité d’entendre la voix de la raison, de l’honneur et de l’amitié ! Tu peux encore adoucir ton sort, et, sois-en sûr, de mon côté je ferai tout ce qui dépendra de moi ! Tiens, voici l’honorable chef de notre gouvernement qui te confirmera ce que je te dis. »

Ici, Sipiaguine éleva la voix :