connu basané qu’il avait rencontré dans le petit bois. Sipiaguine lui amena Néjdanof et présenta le nouveau venu comme son beau-frère, le frère de Valentine Mikhaïlovna, Serge Mikhaïlovitch Markelof.
« Je vous prie, messieurs, de vous entendre et de vous aimer, » s’écria Sipiaguine avec le sourire majestueusement affable et pourtant distrait, qui lui était familier.
Markelof fit un salut silencieux, et Néjdanof le lui rendit… Quant à Sipiaguine, jetant tant soit peu en arrière sa petite tête et haussant les épaules, il s’éloigna comme s’il voulait dire : Je vous ai présentés l’un à l’autre ; maintenant, que vous vous entendiez et vous aimiez ou non, cela m’est parfaitement indifférent !
Valentine s’approcha alors du couple demeuré immobile, présenta derechef les deux hommes l’un à l’autre et s’adressa à son frère avec cette expression caressante et lumineuse qu’elle pouvait évoquer à son gré dans ses beaux yeux.
« Eh bien, cher Serge, tu nous oublies tout à fait. Tu n’es pas même venu pour la fête de Kolia ! Est-ce que tu as tant d’affaires ? Il est en train d’établir de nouveaux règlements avec ses paysans, dit-elle à Néjdanof ; c’est très-original : il leur donne de tout les trois quarts, et ne garde qu’un quart pour lui, et encore trouve-t-il qu’il s’en réserve trop.
— Ma sœur aime la plaisanterie, dit à son tour Markelof à Néjdanof ; mais je conviens avec elle que, pour soi tout seul, se réserver le quart de ce qui appartient à cent personnes, c’est véritablement trop.
— Et vous, Alexis Dmitritch, avez-vous remarqué que j’aime la plaisanterie ? » demanda Mme Sipiaguine avec la même douceur câline dans le regard et dans la voix.
Néjdanof ne trouva point de réponse, et au même instant on annonça l’arrivée de Kalloméïtsef. La maîtresse du logis alla au-devant de lui, et, quelques minutes plus tard, un domestique apparut, et d’une voix solennelle annonça que le dîner était prêt.