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Page:Tourgueniev - Étranges histoires (Étrange histoire ; Le roi Lear de la steppe ; Toc, Toc, Toc ; L’Abandonnée), 1873.djvu/132

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— Je ne pourrai pas m’endormir, ma mère, répondit tristement Kharlof, j’ai comme des marteaux qui me battent dans la cervelle. Chassé comme un animal immonde… !

— Couche-toi et dors, interrompit ma mère. Ensuite on te donnera du thé et nous causerons ensemble. Ne perds pas courage, mon vieil ami. On t’a chassé de ta maison, tu trouveras toujours un asile dans la mienne. Je n’ai pas oublié que tu m’as sauvé la vie.

— Ma bienfaitrice, s’écria Kharlof en se couvrant le visage des deux mains, c’est à votre tour de me sauver… »

Cet appel toucha ma mère presque jusqu’aux larmes. — Je ne demande pas mieux que venir à ton aide en tout ce que je puis, Martin Pétrovitch ; mais tu dois me promettre que tu m’obéiras désormais, et que tu chasseras bien loin toute mauvaise pensée.

Kharlof découvrit son visage. — S’il le faut, dit-il, je puis pardonner.

Ma mère fit de la tête un signe d’approbation. — Je suis ravie, dit-elle, de te voir dans une disposition d’esprit aussi vraiment chrétienne ; mais nous parlerons de cela plus tard. En attendant, fais-toi propre, et tâche de dormir. — Emmenez Martin Pétrovitch dans la chambre verte, dit-elle au maître d’hôtel, dans celle du défunt seigneur, et que tout ce qu’il demande lui soit à l’instant fourni. — Que ses habits soient nettoyés et séchés, et le linge néces-