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Page:Tourgueniev - Étranges histoires (Étrange histoire ; Le roi Lear de la steppe ; Toc, Toc, Toc ; L’Abandonnée), 1873.djvu/66

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— Il y en a.

— Et de la crème aussi ?

— Et de la crème.

— Allons, traîne tout cela sur la table. En attendant, je lui montrerai mon cabinet. Venez par ici, » ajouta-t-il en me faisant signe du doigt. — Dans sa maison, il ne me tutoyait plus ; avec un hôte, on doit être poli. Il me conduisit le long d’un corridor. « Voilà où je réside, dit-il tout à coup, en enjambant le seuil d’une large porte, voilà mon cabinet. Soyez-y le bienvenu. »

C’était une grande chambre, presque nue, sans revêtement en plâtre, de sorte qu’on voyait les solives qui en formaient les parois. Sur de grands clous, plantés sans symétrie, pendaient deux fouets, un vieux chapeau à trois cornes, un fusil à pierre, un sabre, un potiron, un étrange collier de cheval avec des plaques de cuivre, et la fameuse gravure représentant la chandelle allumée et exposée à tous les vents. Dans un coin était posé un divan en bois recouvert d’un tapis bariolé. Des milliers de mouches bourdonnaient sourdement sous le plafond. Du reste, il faisait frais dans cette chambre ; mais on y était pris à la gorge par cette odeur sauvage que partout Kharlof portait avec lui.

« N’est-ce pas que mon cabinet est beau ? me demanda-t-il.

— Très-beau.

— Regarde un peu ce collier hollandais que j’ai là, continua-t-il en retombant dans son tutoiement ha-