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Page:Tourgueniev - Étranges histoires (Étrange histoire ; Le roi Lear de la steppe ; Toc, Toc, Toc ; L’Abandonnée), 1873.djvu/80

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verrai aussi Souvenir, et je dirai encore à Lisinski de s’y rendre. Tu n’as pas invité Gavrilo Fedoulitch ?

— Gavrilo Fedoulitch…, le sieur Gitkof…, est pareillement averti de ma part : il doit venir… comme fiancé. »

Kharlof avait évidemment épuisé la dernière réserve de son éloquence. De plus, je croyais avoir remarqué qu’il voyait d’un œil peu bienveillant le mari que ma mère destinait à sa seconde fille. Peut-être rêvait-il un parti plus avantageux pour sa chère petite Evlampia.

Il se leva lentement de la chaise, et frotta le parquet du pied.

« Grand merci pour votre consentement, dit-il.

— Où vas-tu donc, reprit ma mère. Attends, je vais te faire donner à déjeuner.

— Grand merci, répéta Kharlof ; mais je ne puis, il faut retourner à la maison. »

Il s’avança à reculons vers la porte, et allait la franchir en se mettant de côté, suivant son habitude.

« Attends, attends, s’écria ma mère. Vraiment tu donnes ainsi tout ton avoir à tes filles, sans aucune réserve ?

— Assurément, sans réserve.

— Et toi, où vivras-tu ? »

Kharlof agita ses bras en l’air.

« Où je vivrai ? Mais dans ma maison, comme j’ai fait jusqu’à présent. Quel changement voulez-vous qu’il y ait ?