Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/204

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— Non, sans doute, quoique même dans cette partie, il soit destiné à être parmi les plus savants.

— Quelle est donc la carrière où…

— Je ne saurais vous le dire dès à présent, mais il sera célèbre.

— Il sera célèbre ! répéta le vieillard, et il tomba dans une profonde rêverie.

— Arina Vlassievna vous fait prier de venir prendre le thé, lui dit Anfisouchka qui passait avec un énorme plat de framboises.

Vassili Ivanovitch tressaillit et se redressa.

— Aura-t-on de la crème pour les framboises ? dit-il.

— Oui, il y en aura.

— Qu’elle soit bien froide surtout ; tu m’entends ! Ne faites pas de façons, Arcade Nikolaïtch, prenez-en davantage. Pourquoi Eugène ne rentre-t-il pas ?

— Je suis ici, répondit Bazarof de la chambre d’Arcade.

Vassili Ivanovitch se retourna vivement.

— Ah ! tu voulais surprendre notre hôte ; mais tu es en retard, amice, car nous causons ensemble depuis une heure. Maintenant allons prendre le thé, ta mère nous attend. À propos, j’ai quelque chose à te demander.

— Quoi ?

— Il y a ici un paysan qui souffre d’un ictère.

— C’est-à-dire qu’il a la jaunisse.

— Oui, il est atteint d’un ictère chronique et opiniâtre. Je lui ai prescrit de la centaurée et du chien-