Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/226

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et posant sa tête blanchie sur la tête blanchie du vieillard, elle lui dit : « Qu’y faire, Vassili ! un fils est comme un lambeau qui se détache ; c’est un jeune faucon ; il lui plaît de venir et il arrive ; il lui plaît de repartir et il s’envole ; et nous deux, nous sommes toi et moi comme deux petits champignons dans le creux d’un arbre ; placés à côté l’un de l’autre, nous restons là pour toujours. Moi seule je ne changerai pas pour toi, comme toi tu ne changeras pas pour ta vieille femme ! »

Vassili Ivanovitch se découvrit la figure qu’il avait cachée dans ses mains, et embrassa sa femme, sa compagne, plus étroitement qu’il ne l’avait jamais fait, même dans sa jeunesse ; elle l’avait consolé dans son chagrin.


XXI


Les deux amis n’échangèrent presque pas une parole, jusqu’au moment où ils arrivèrent à la demeure de Fédote. Bazarof n’était pas satisfait de lui-même, et Arcade était mécontent de son ami. Il ressentait en outre cette tristesse sans motif, qui n’est connue que des jeunes gens à leur premier début dans la vie. Le cocher ayant changé les chevaux, remonta sur le siège et demanda s’il fallait prendre à droite ou à gauche.

Arcade tressaillit. Le chemin qui s’étendait à leur droite conduisait à la ville, et de là à la campagne de