Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/504

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vre attachées à des bâtons assez longs, et garnies de clochettes qu’ils font rouler d’une maniére assez harmonieuse. Le Prêtre précedé des encensoirs et au milieu des flambeaux et de ces instrumens de musique, porte les especes en procession autour du sanctuaire. C’est alors que le peuple mal instruit se prosterne et adore les especes non consacrées. Le Clergé encore plus coupable chante à genoux un Cantique qui commence, le Corps du Seigneur est present devant nous. Il semble que les Armeniens ayent pris cette abominable coutume des Grecs ; car les Grecs, comme nous l’avons remarqué, par une ignorance inexcusable adorent aussi les especes avant la consecration. Leur erreur vient de ce qu’autrefois ils croyoient qu’il n’étoit permis de celebrer que le Jeudi Saint, et consacroient ce jour-là autant d’hosties qu’il en falloit pour tous les jours de l’année ; on les gardoit dans une armoire à côté de l’Evangile, et le peuple avoit raison de les adorer quand le Prêtre les portoit de cette armoire à l’autel. Aprés cette petite procession le Prêtre met les especes sur l’autel, et prononce les paroles sacramentelles ; se tournant vers le peuple qui se prosterne, baise la terre et frappe sa poitrine ; il leur montre l’hostie et le calice, en disant, Voici le Corps et le Sang de Jesus-Christ qui a eté donné pour nous. Il se tourne ensuite vers l’autel et communie en mangeant l’hostie trempée dans le vin. Quand il donne la communion aux fidelles, il répete trois fois les paroles suivantes pour en mieux faire sentir l’énergie. Je crois fermement que ceci est le Corps et le Sang du Fils de Dieu qui ôte les pechez du monde, et qui non seulement est mon propre salut, mais celui de tous les hommes. Le peuple répete tout bas ces paroles mot pour mot.

Malgré cette sainte précaution les Armeniens Schismatiques ne paroissent gueres pénétrez de la grandeur de