Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/549

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mille hommes de cette armée passérent dans la Thrace avec Leonorius, qui s’appelloit sans doute Leonorix comme Gaulois, et que je nommerois volontiers Leonor pour m’accommoder à nôtre Langue. On en peut dire de même de l’autre Chef qui le suivit : les Auteurs Latins l’appellent Lutarius du mot Lutarix, lequel répond bien mieux à nos anciennes terminaisons gauloises.

Ces deux Chefs soumirent tout le pays jusques à Byzance, et descendirent sur l’Hellespont. Ravis de ne trouver l’Asie séparée de l’Europe que par un bras de mer, ils députérent à Antipater, qui commandoit sur la côte d’Asie, et qui pouvoit s’opposer à leur passage. Comme la chose traînoit, et qu’apparemment Antipater ne croyoit pas pouvoir s’accommoder de tels hostes, les deux Roys se séparérent. Leonorius retourna à Byzance. Lutarius receut quelque temps aprés une Ambassade de Macedoniens, députez par Antipater sur deux vaisseaux et trois chaloupes. Pendant qu’ils observoient les troupes Gauloises, Lutarius ne perdit pas de temps, et les fit passer jour et nuit en Asie sur ces bâtimens. Leonorius ne tarda pas d’entrer en Bithynie avec les siennes, invité par le Roy Nicomede, qui se servit fort utilement de ces deux corps de Gaulois pour combattre Zipœtes, qui occupoit une partie de ses États.

Les Gaulois jettérent la terreur par toute l’Asie, jusques vers le Mont Taurus, comme nous l’apprend Tite-Live que je suis pas à pas dans cette expedition. Des vingt mille Gaulois qui étoient partis de Grece, il n’en restoit pourtant gueres plus de la moitié, mais tout cedoit à leur valeur, et ils mirent tout le pays à contribution. Enfin comme il y avoit trois sortes de Gaulois parmi eux, ils partagérent leurs conquêtes de telle sorte, que les uns s’arrêterent sur les côtes de l’Hellespont ; les autres habi-