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ARÔMES DU TERROIR


Le paysan s’acharne au viol de la Victoire,
Et son œuvre soutient la foule expiatoire
Qui pour la Liberté donne son jeune sang ;
Et ceux qui sont tombés sous l’horrible avalanche
Des obus et des gaz que la rage déclenche,
Par terre et par les airs, meurent en bénissant
Le souvenir consolateur d’un vieux village,
Pour que les fils du sol, brisant le vasselage,
Redressent sur la vie un front moins soucieux,
Pour que leurs yeux n’aient plus, sur les fermes inertes,
Le spectacle émouvant des campagnes désertes,
 Et des ruines devant eux.

Les révolutions naissent dans les campagnes.
L’idée altière fuit quand même hors des bagnes
Que les vieux préjugés imposent au labeur.
L’Ave Caesar n’est plus, qui bouscule les foules
Dans la mêlée ardente où l’humanité croule.
Les ferments qui germaient dans la chaude vapeur
S’échappent du sol noir dont ils brisent l’écorce,
Et poussent librement leur richesse et leur force
Dans l’azur et la brise où vont les vols d’oiseaux ;
L’atome qui dormait dans la féconde vase
Grandit dans les rameaux des chênes en extase,
 Et vit dans les frêles roseaux.