Page:Tremblay - La sépulture d'Étienne Brulé, 1915.djvu/21

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chaine fête des morts aurait dû se faire en 1648, mais à cette époque les incursions iroquoises, terminées deux ans plus tard par la dispersion complète des Hurons, avaient déjà sensiblement affecté les coutumes ouendates, et les gens de l’Ours, comme toutes les autres tribus, songeaient à trouver des moyens de défense contre l’invasion plutôt qu’à poursuivre des œuvres de paix.


OÙ IL FAUDRAIT CHERCHER.


Le sol de Toanché a-t-il pu garder une sépulture pendant trois cents ans ? Les monographies de Hunter et de Laidlaw sont sur ce point convaincantes. Le grand nombre des ossuaires découverts, la bonne conservation des ossements remis au Musée archéologique de Toronto, expliquent suffisamment cet aspect de la question. L’écoulement des eaux se fait rapidement dans le tamis de sable qui surjette le fond d’argile, et la succession rapide des plis anticlinaux et synclinaux de la région facilite le ruissellement, puis le drainage dans les nombreux cours d’eau. La saturation est impossible sur les hauteurs, où les villages de la Pointe étaient établis ; elle est empêchée par l’ondulation du terrain et par le régime des ruisseaux, lacs et rivières dans lesquelles le surplus de la précipitation s’écoule. Hunter nous dit qu’on a retrouvé des peaux de castor assez bien conservées dans des ossuaires hurons.

Brulé fut enterré seul. Ses ossements furent placés dans une enveloppe d’écorce et de peaux, au fond d’un trou d’environ quatre pieds de profondeur, selon la coutume huronne ; il est probable que l’aiheondé, ou fossoyeur chargé des funérailles, plaça dans la fosse les armes du mort, ou quelque ustensile dont l’interprète faisait un usage fréquent. La seule autre sépulture simple de la région est celle de l’octogénaire Tsindacaiendoua, inhumé par les Jésuites à Ihonatiria, à plus d’une lieue de Toanché I (Rel, viii, 136). La dépouille du converti est complète, la sépulture ayant été faite par des chrétiens ; celle de Brulé ne l’est pas, ayant été enterrée par des payens après un festin anthropophagique. Le corps a été mangé, et les petits os ont dû être jetés au feu ; mais le crâne, qu’on retrouvera fortement fracturé, est dans la fosse, avec le torse et les fémurs. Il n’est pas impossible de retrouver une petite croix avec les os. Brulé était chrétien, et les Toanchains ont dû lui laisser les rares objets de piété qu’il pouvait avoir ; car il ne faut pas exagérer la dévotion de notre interprète. Il avait de bonne heure adopté les coutumes de ses hôtes, et même leur genre de superstition, témoin cette offrande de pétun au rocher fatidique de la rivière Mattawa (Sagard, Hist., II, 457).