Page:Tremblay - Les ailes qui montent, hommage au nouvel an 1919, 1918.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’aide d’un Dieu clément, et volaient à l’Enfer
Le secret meurtrier d’une vapeur viride,
Pour détruire d’un coup les êtres et les champs,
Afin que le désert assurât la conquête,
Et livrât tout un monde en ruines aux camps.
Ces peuples, ces soldats, la Folie à leur tête,
Croyant avoir au bras le bouclier de Thor,
Affrontaient, chef baissé, la mitraillante averse
Qui creusait devant eux les couloirs de la Mort ;
Et comme un blé mûri que le faucheur renverse,
Ils tombaient foudroyés ; mais d’autres surgissaient.
Dans l’étroite vallée où sont agonisantes
Les cruautés d’hier, qui déjà s’épuisaient ;
Où, sans pouvoir venger leurs détresses cuisantes,
Gémissent les blessés et se taisent les morts ;
Où tous les doigts crispés déchirent les tuniques,
Comme pour découvrir en un dernier effort,
Le venin, dans les cœurs, des haines sataniques.
Tel un déferlement de fléaux surhumains,
Issant d’un gouffre noir et grossis dans les flammes,
Ils roulaient derrière eux les empires germains,
Poussés au suicide — hommes, enfants et femmes —
Avec le bruit pesant d’un trône qui s’abat.
Dans les foyers éteints d’immenses incendies,
Dans les villes en pleurs où la foule se bat,
Dans les écrasements des sombres tragédies