Page:Tremblay - Les ferments, 1917.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
45
RAPSODIE

Petit grain de blé,
Quel deuil a troublé
La paix de nos chaumes ?
Tu mouilles ma paume,
Petit grain de blé.

Ceux qui sont morts viennent parler à ceux qui vivent.
Ils brisent un moment les liens qui les rivent
À leur monde invisible où ne vont pas nos yeux.
Dans la tranquillité des soirs mystérieux,
J’entends sourdre la voix du passé, qui sommeille
Dans les alluvions où j’enfouis l’oreille.
Elle dit, cette voix, que le droit du plus fort
A les mêmes rigueurs contre le saint effort.
L’Europe n’est pas seule où la Justice pleure.
On veut qu’en mes vertus la générosité meure
Pour avoir trop aimé l’âme du sol natal,
Et jusque dans mes bois, un gendarme brutal
Veut me faire oublier le doux parler des mères,
Qui depuis si longtemps berçait mes œuvres chères.