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Page:Trent - Litterature americaine.djvu/262

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254 LA PÉRIODE LOCALE (1830-1865)

technique. Ainsi, quoi que nous puissions dire du peu d’abondance de la veine lyrique de Poe et de la nature des sujets qu’il a traités, qui sont en dehors de la vie universelle et qui s’écartent des préoccupations usuelles de l’humanité, nous ne pouvons lui refuser la puissance poétique ; et nous devons lui accorder l’influence qui s’attache à la parfaite possession d’un art-

Examinons maintenant l’œuvre de Poe au point de vue de la fiction et essayons d’indiquer dans quelle mesure elle doit survivre. Sa seule tentative de long roman, Tlie Narrative of Arthur Gordon Pym, n’est pas sans mérite, mais peu de lecteurs s’en montrèrent émus et ce n’est pas, après tout, un ouvrage de première valeur. On peut laisser aussi de côté ses nombreuses fantaisies dans le genre grotesque ou simplement humoristique. Elles ne le caractérisent pas suffisamment. C’est sur un certain nombre de contes sombres, troublants, éthérés, tragiques et morbides, tels que « Shadow », « The Fall of the House of Usher », « Eleonora », The Masque of the Red Death » et « The Black Cat », autant que sur les contes pseudo-scientifiques et de raisonnement subtilement ingénieux, tels que « Hans Pfaal » et « The Gold Bug » que se fonde sa réputation de conteur. Autrement dit, comme romancier, pas plus que comme poète, il n’a fait preuve d’une puissance de composition longtemps soutenue. Il est aussi peu comparable à Walter Scott, à Cooperou à Hawthorne, en prose, qu’à Byron, Shellcy ou Tennyson en vers. On ne peut que le mettre au rang des maîtres de la nouvelle, avec Boccace et Maupassant ; il est certain que, comme influence littéraire et comme portée, ses contes, pris dans leur ensemble, lui assurent une place unique parmi les romanciers. Peu d’écrivains, s’il en est, savent empoigner leurs lecteurs comme Poe.