Aller au contenu

Page:Trent - Litterature americaine.djvu/336

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

328 LA PÉRIODE LOCALE (1830-1865)

et progressive Amérique de l’époque jacksonieune. Il s’était mêlé h sa politique, ii ses spéculations, à son expansion matérielle. L’idéal démocratique, et non la culture spirituelle et intellectuelle, encore moins la culture étrangère qu’importait la Nouvelle-Angleterre, lui semblait être le levain qui devait alléger le pain national, et, au lieu d’agir de haut en bas sur les masses, ce levain devait opérer de bas en haut en gagnant toutes les classes sociales. Du reste, proche encore par sa naissance des premières générations de la République, il n’avait pas perdu cette conviction que les Etats-Unis étaient, par essence divine, l’agent régénérateur du monde.

En outre, la santé parfaite et la vigueur de Whitman, jointes à une insouciance primordiale pour toute notion de péché et pour toute forme religieuse étroite et sectaire, développèrent naturellement son caractère d’Américain se suffisant à lui-même et satisfait de chanter la chanson de son cru, plus ou moins typique, mais personnelle. Il était pratiquement impossible pour un homme de son tempérament et de son degré d’instruction de se faire le coryphée d’aucune des sectes religieuses, nouvelles ou anciennes, qui se disputaient les âmes au temps de sa jeunesse et des premières années de son Age mûr. Mais il lui était, apparemment, tout aussi impossible de ne pas réagir contre les vues étroites de ses contemporains sur le bien et le mal, de ne pas passer d’un extrême à l’autre en sympathisant avec le mal tout comme avec le bien, de ne pas proclamer dogmatiquement une philosophie religieuse de vaste tolérance en harmonie avec la démocratie universelle, de ne pas souligner l’importance primordiale de l’individu, seule raison d’être et seule fin de toute conception religieuse, sociale ou politique, et de ne pas affirmer théoriquement l’éga-