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tre les vers & pour les vapeurs, les coliques, la jaunisse & les pâles couleurs. On la prend en infusion dans du vin ; c’est ce qu’on appelle vinum absynthites, en extrait, extracyum absynthii ; en sirop, syrupus de absynthio. On l’emploie dans les fomentations & dans les cataplasmes, pour arrêter les progrès de la gangrène. On ne se sert que des feuilles & des sommités de cette plante. Et de l’eau d’absynthe, aqua absynthites. On a aussi donné à l’absynthe le nom d’alvine, ou alvyne. Voyez ce mot.

Absynthe, figurément, signifie Douleur, amertume, déplaisir. Dolor animi. Mais je ne voudrois pas l’employer au pluriel comme Malherbe, qui a dit, adoucir toutes nos absynthes.

Ce mot vient d’α, particule privative en Grec, & πίνθιον ; c’est-à-dire, impotabile, non potable ; & les Comiques Grecs la nomment en effet ᾶπίνθιον, parce que c’est une plante si amère, qu’on a de la peine à boire une liqueur dans laquelle elle aura trempé. Quelques-uns le font venir du Grec ἅπτω, toucher, ἅψισθον, ᾶψεσθαι & veulent que ce nom ait été donné à cette plante par antiphrase, parce que nul animal n’en peut goûter, ni la toucher, à cause de son amertume. Cette étymologie n’est pas vraisemblable, & il est étonnant que d’habiles gens aient pu la hasarder ; ἅπτω est aspiré, & absynthium ne l’est pas : on dit ἀψίνθιον & non ἅψιστον ; l’un a un θ, & l’autre un τ, & le premier n’a pu se former du second, ni de ἅψεσθαι. D’autres le font venir d’ἀψίνθιον, qui veut dire désagréable, indelectabile, & qui s’est formé de l’α privatif, & de ψίνθος, plaisir, delectatio, à cause de l’amertume qui rend cette plante désagréable. Cette étymologie paroît plus juste, & justifie en même temps l’orthographe d’absinthe, sans y.

☞ ABSYRTIDE. s. f. Nom que l’antiquité a donné à des isles de la mer Adriatique. Absyrtis. Les Absyrtides ont l’Itrie au couchant, & la Dalmatie au levant. Elles ont pris leur nom d’Absyrte, fils d’Acetas roi de Colchos, parce qu’il y fut tué par Médée sa sœur.

ABU.

☞ ABUCCO, ABOCCO ou ABOCCHI. s m. Poids dont on se sert dans le royaume de Pégu. Un abucco est de douze Teccalis & demi. Deux abuccos font l’Agiro, qu’on nomme aussi Giro. Deux Giri font une demi-Biza, & la Biza pese cent Teccalis, c’est-à-dire, deux livres cinq onces poids fort, ou trois livres neuf onces poids léger de Venise.

☞ ABUDIACOM. Ancienne ville de la Vindélicie. Abudiacum. Selon quelques Auteurs, Abudiacom est le village d’Apping, en Bavière ; & selon d’autres, celui d’Abach, dans le même Duché.

☞ ABUHINAN. Petit village & château du Bilédulgérid, en Afrique. Abuhinanum. Il est sur la rivière de Géhir.

☞ ABUIA. Nom de deux Îles Philippines. Abuya, Abaca. L’une est près de l’île de Cébu, entre celles de Luçon & de Mindanas : l’autre n’en est pas loin, entre Bohol & Cubarao.

☞ ABUKESB. s. m. C’est la valeur du Daalder, ou écu de Hollande ; il se nomme ainsi par les Arabes & les Turcs du Caire, & parmi tous les négocians des villes maritimes d’Egypte. Mais à Smyrne & à Constantinople, on n’appelle point le daalder de Hollande de ce nom ; on l’appelle Aslani. C’est le nom dont on se sert aussi dans les Echelles du Levant. La raison de cette diverse dénomination vient de deux noms ; du nom Aslani, qui, en langue Turque, signifie lion, parce que l’on voit l’empreinte d’un lion sur chaque côté de ces pièces d’argent, que les Arabes ont pris pour un chien, qui, en leur langue est nommé abukesb.

ABUNA, ou ABOUNA. s. m. Terme Arabe, qui se trouve dans les Relations, & qui signifie proprement, Notre Père. L’on s’en sert en parlant des Religieux Chrétiens Arabes. Ainsi ils disent, Abouna Ephrem ; c’est-à-dire, Notre Père Ephrem, qui est la même chose que si nous disions, Le Père Ephrem, en parlant d’un Religieux de ce nom, ou Père Ephrem, en parlant à lui même. Selon


Portel, il faut dire Abana, אבאנא, & l’interprète Arabe l’écrit ainsi, Matth VI. 9. On dit cependant, Abouna, אבונא

☞ ABURRA. Vallée du nouveau royaume de Grenade, dans l’Amérique méridionale. Aburra.

ABUS, s. m. Dérèglement, ce qui se fait contre les règles, le bon ordre. Abusus. Il y avoit des abus dans tous les ordres de l’état, qui ont été réformés par Louïs le Grand. Les Conciles, les Ordonnances, tendent à réformer les abus contre la Discipline & la Police. C’est le Grand Constantin, qui, en introduisant les richesses dans l’Eglise, y a introduit en même-temps les abus, & le relâchement de la Discipline. Port-R. Ce Ministre a réformé les abus des Finances ; ce Président les abus de la Justice.

Ce mot se met quelquefois absolument pour rejetter ce qu’un autre a dit :

Abus, s’écria-t-il, hé ! devenez dévote. Deshoul.

Vous croyez réussir par-là, abus, abus ; vous n’en viendrez jamais à bout.

Abus, signifie aussi, Mauvais usage d’une chose. On commet bien de l’abus dans la distribution des aumônes. Les abus qu’on fait de l’Ecriture ne naissent pas de la lecture innocente du Peuple. Gomber. Le Concile de Trente a défendu les abus qu’on fait de l’Ecriture ; c’est-à-dire, les mauvais usages, les applications qu’on en pourroit faire à des choses profanes, mauvaises, criminelles.

Abus, signifie aussi, Erreur, mécompte, tromperie. Error. Si vous croyez que cela soit, c’est un abus ; c’est-à-dire, C’est une erreur, un mécompte ; vous vous trompez. C’est un abus que de croire telle chose, pour dire, que c’est se tromper. C’est un abus que de s’imaginer de réussir dans le monde sans avoir de puissans patrons. C’est un abus que d’exhorter un jeune libertin à songer à la mort ; pour dire, cela est inutile, on n’y gagne rien. C’est dans ce dernier sens que Mr de la Fontaine a dit fort élégamment dans ses fables :

Alléguer l’impossible aux Rois, c’est un abus ;

c’est-à-dire, que quand un Roi veut quelque chose, il faut lui obéir, quand même la chose seroit très-difficile, & paroîtroit impossible. Les Mahométans vivent dans l’abus ; ils suivent les abus de leur faux prophète. Dans ce dernier exemple, il signifie tromperie, & se prend activement. Il se dit plus ordinairement dans l’autre sens, qui est passif. En Arithmétique, quand la preuve ne se trouve pas bonne, on connoît qu’il y a de l’abus dans le calcul.

Appel comme d’abus. In abusu dicendi juris ad Regium superius Tribunal provocatio. C’est un appel qu’on interjette au Parlement, des sentences des Juges ecclésiastiques, quand ils entreprennent sur la Puissance séculière ; quand ils jugent des choses qui ne sont point de leur juridiction, ou quand ils jugent contre les saints Canons & la Discipline de l’Eglise. Les appels comme d’abus ont été introduits, autant pour s’opposer aux entreprises de la Juridiction ecclésiastique sur la Juridiction temporelle, que pour mettre ordre aux attentats de la Cour de Rome sur les libertés de l’Eglise Gallicane. Il est certain en effet que l’entreprise des Evêques alla si loin, qu’ils se rendirent les maîtres de toutes les affaires civiles sous des prétextes de piété, & qu’ils dépouillèrent presqu’entièrement la Juridiction séculière. On ne peut point déterminer tous les cas où l’on peut appeler comme d’abus, parce qu’on ne peut pas limiter toutes les contraventions dont les Ecclésiastiques sont capables pour relever leur autorité. Bouchel. L’abus ne se couvre point par quelque sentence, par quelque possession, ou prescription que ce soit. Quand l’Official juge du possessoire des dixmes inféodées, du possessoire des bénéfices, il y a abus. On appelle comme d’abus, des unions des bénéfices, des Rescrits de Cour de Rome, des fulminations des Bulles d’excommunication, quand elles sont contre les loix de l’Eglise reçues en France. Alors la Cour prononce qu’il y a abus. Quelquefois l’on convertit l’appel comme d’abus en appel comme de grief. L’appel


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