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EPISTRE


Ce seroit, Monseigneur, luy dérober une partie de son prix, que de laisser ignorer au Public la part que vous avez bien voulu y prendre. On ne pourra s'empêcher d'en concevoir une idée avantageuse, quand on sçaura qu'il a été fait, non seulement sous les auspices, mais même si je l'ose dire, sous la direction d'un Prince si judicieux & si habile ; d'ailleurs il y va de la gloire des belles Lettres, que tout le monde sçache que vous ne vous contentez de vous intéresser à leur avancement, & à leur progrès, par la protection & l'appuy que vous leur donnez, mais que vous daignez encore y contribuer de vos soins & de vos lumieres.

Cette circonstance, Monseigneur, donne un nouveau lustre à la faveur dont vous honorez les beaux Arts. Elle fait voir que si vous les protegez, ce n'est point simplement, parce qu'il est beau & glorieux à un grand Prince de les prendre sous sa protection ; mais bien plus encore, parce que vous en connoissez toutes les beautez, & que vous en estes véritablement touché. Cette affection leur fait d'autant plus d'honneur, qu'elle est plus éclairée, & il y a lieu de juger qu'elle sera d'autant plus constante, qu'elle n'est point dans Votre Altesse Serenissime l'effet de la prévention, mais le fruit d'un discernement délicat, & de ce goût exquis que vous avez reçû de la nature pour toutes choses, & en particulier pour les belles Lettres.

Ce doit être pour moi, Monseigneur, un nouveau motif de redoubler mon application, & mes soins, à seconder vos intentions de ce côté-là, autant que j'en suis capable. Je crois ne pouvoir mieux répondre à l'honneur que m'a fait Vostre Altesse Serenissime, lorsqu'elle m'a chargé de la direction de son Imprimerie, qu'en m'efforçant de la rendre plus utile au Public qu'il se pourra faire, par des Ouvrages sçavans & dignes de la curiosité de ceux qui ont du gout pour les sciences, j'ose espérer Monseigneur, que la seconde Edition de l'Ouvrage que je prens la liberté de vous présenter, n'aura pas un sort moins favorable que la premiere : on n'a rien épargné pour le rendre parfait, & pour le mettre en état de paroistre dignement sous le nom & sous l'autorité de Vostre Altesse Serenissime. Pour moy, Monseigneur, je me tiendray trop récompensé de mon travail, si elle veut bien le regarder comme une marque du zele que j'ay à remplir tous mes devoirs dans l'employ dont il luy a plu m'honorer, & du profond respect avec lequel je seray toute ma vie,




MONSEIGNEUR,
DE VOSTRE ALTESSE SERENISSIME,
Le très-humble & très-obéissant serviteur
Estienne Ganeau