Page:Trevoux - Dictionnaire, 1721, T01, A.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49 ABS. ABS. 50.


qu’il y a croyent que l’absolution ad cautelam ne se donne que par provision à celui qui a été excommunié, dans la crainte qu’il ne meure subitement, ou par quelque accident, avant qu’il ait pû se faire absoudre. Mais ce n’est point par cette raison ; car elle se donne moins en faveur de celui qui a été excommunié, qu’en faveur de ceux, qui par une conscience timorée feroient scrupule de fréquenter l’excommunié : or cette absolution leur sert de précaution, pour les assurer qu’ils ne participent point à l’excommunication. Bouchel. On dit aussi absolution à caution, & tous ces mots se trouvent dans les bons Livres. La première fois que l’on trouve qu’il est fait mention de l’absolution à cautele, ad cautelam, c’est dans une lettre du Pape Célestin écrite en 1195. à l’Evêque de Lincoln, où il lui ordonne de publier une suspense par tout le Diocese d’Yorck, & à Géofroy qui en étoit Archevêque, en l’avertissant cependant d’absoudre ces personnes ad majorem cautelam.

Absolution, en termes de Bréviaire, est une courte prière que dit celui qui officie à chaque nocturne des Matines avant les bénédictions & les leçons. On appelle absolutions, les encensemens & aspèrsions d’eau benite qu’on fait sur les corps des Princes & des Prélats qu’on enterre avec grande cérémonie.

ABSOLUTOIRE, adj. Qui porte absolution. Absolutorius. Il a une sentence absolutoire.

ABSORBANT, s. m. ABSORBANS. pl. Terme de Médecine, qui est tantôt adjectif, tantôt substantif. Medicamina ad absumendum nata. On appelle absorbans des médicamens terrestres & poreux, qui s’imbibent aisément des sels acides & alkalis, & qui boivent les substances aqueuses ou sulphureuses. Les os calcinés, la corne de cerf préparée, l’yvoire brûlé, le corail, les yeux d’écrevisse, &c. sont de véritables absorbans. On a confondu quelque temps les absorbans avec les sels alkalis, sans doute à cause de leurs effets & de leurs propriétés ; les alkalis absorbant les acides en amortissent l’activité. Le quinquina est une sorte d’absorbant qui guérit les fièvres intermittentes.

ABSORBER, v. act. Engloutir, dissiper, consumer, emporter. Absumere. Les eaux absorbent presque toute la lumière qu’elles reçoivent du soleil. Roh. Il est peu en usage au propre, si ce n’est en parlant des animaux voraces : mais il se dit au figuré, & il emporte d’ordinaire un mauvais sens. Les droits de la Femme ont absorbé tous les biens du Mari. Le frais d’un scellé absorbent les plus clairs deniers de cette succession. Ce goinfre a absorbé tout son patrimoine. La voix est absorbée dans les voûtes. Ablanc. c’est-à-dire, qu’elle s’y perd. La question de l’infaillibilité de l’Eglise absorbe toutes les autres controverses. Claude. Ce mot vient du Latin absorbeo, signifiant le même.

Absorber, se dit en jardinage, des branches gourmandes qui naissent sur les arbres fruitiers, & qui ôtent aux autres branches la plus grande partie de la nourriture dont elles ont besoin. Il faut être très-soigneux de retrancher les branches gourmandes, crainte qu’elle n’absorbent la substance nécessaire pour nourrit le teste du corps de l’arbre. Cette branche a toute absorbé la sève, ou le suc nourricier. Liger. Il se dit avec le pronom personnel. Comme tout passe & s’absorbe pour jamais dans l’éternité de Dieu, les choses périssables ne valent pas la peine d’être considérées. Ab. de la Tr.

ABSOUDRE, v. act. Décharger d’une accusation, de la peine d’un crime. Remettre un crime commis. J’absous, tu absout, nous absolvons, vous absolvez, ils absolvent. Imparf. j’absolvois. Fut. j’absoudrai. Subj. que j’absolve. Part. act. absolvant. Part. passif, absous. Absolvere. Absoudre un Pénitent, lui remettre ses péchés dans le Tribunal de la Confession. Dans le doute il est plus expédient d’absoudre un criminel, que de condamner un innocent. Court. On l’a absous à pur & à plein. On dit aussi dans le discours familier, en parlant d’un défunt, que Dieu absolve, c’est-à-dire, à qui Dieu fasse miséricorde.

☞ ABSOUS, oute. part. & adj. Affranchi, ou déchargé de crime. Absolutus, Quand on est absous de la coulpe du péché, il reste encore communément à satisfaire à la peine qu’il mérite.

Absous, se dit aussi en matière civile. Un défendeur conclut toujours à être renvoyé quitte & absous de la demande qu’on lui a faite.

ABSOUTE, s. f. Absolution publique & solemnelle qui se donne au Peuple. Absolution. L’Evêque en fait la cérémonie le Jeudi Saint, ou le Mercredi au soir dans les Cathédrales. L’absoute se fait aussi par les Curés dans les Paroisses le jour de Pâques.

ABSTEME, s. m. Terme dogmatique. Qui ne boit point de vin. Abstemius. Pline dit vini abstemius, L. xxii. Et Apulée a fait Invinius. On s’en sert en Théologie, pour parler de ceux qui dans la Communion ne pourroient prendre les espèces du vin, à cause de l’aversion naturelle qu’ils ont pour cette liqueur. Mr de Meaux s’est servi de l’éxemple des abstêmes, pour défendre le retranchement de la Coupe. Les Dames Romaines dans les premiers temps étoient abstêmes ; & afin qu’on pût s’appercevoir si elles buvoient du vin, une des Loix de la Civilité


Romaine étoit qu’elles donnassent le baiser à leurs Parens, quand elles les abordoient. Plin. l. 22. c. 24. Aulu-Gelle l. 10. c. 22.

Ce mot est formé de la préposition abs, & tementum, ancien mot, qui signifioit du vin. Cependant à l’endroit de Pline que nous avons cité, & dans Horace L. 1. Ep. 12. abstemius semble être pris pour un homme qui s’abstient de quelque boisson, ou même de quelque mets que ce soit.

ABSTENIR, v. n. Qui ne se dit qu’avec le pronom personnel. Se défendre l’usage, se contenir à l’égard de quelque chose, se priver de quelque plaisir. Abstinere, temperare. Conjuguez, je m’abstiens ; je m’abstenois ; je m’abstins ; je me suis abstenu ; je m’abstiendrai ; je m’abstiendrois, &c. Ils sentent, à chaque péché qu’ils commettent, un avertissement intérieur de s’en abstenir. Pasc. Il faut se garder, & s’abstenir de se mettre en colère. Ils disoient qu’Auguste s’étoit abstenu de la qualité de Dictateur. Ablanc. Il faut s’abstenir du vin pendant la fièvre. Les Chrétiens ne s’abstenoient de viande pendant leurs jeûnes, que pour mortifier les sens. Du Pin. Les Juifs étoient obligés de s’abstenir de leurs femmes pendant certains temps. Il ne se peut abstenir de jouer, de parler. Il faut s’abstenir de manger des choses défendues par la Loi. S’abstenir de certaines expressions. Peliss. On le dit quelquefois absolument. Il est plus aisé de s’abstenir que de se contenir.

Abstenir, se dit aussi en matière de récusation de Juges ; & quand la Cour la trouve bien fondée, elle dit pour adoucir l’expression, que le Juge s’abstiendra, c’est-à-dire, de rapporter le proces, ou d’y opiner.

ABSTINENCE, s. f. Vertu morale par laquelle on s’abstient de certaines choses, en vertu d’un précepte moral, ou d’une institution cerémonielle. Abstinentia. C’est une espèce de la tempérance, & elle se confond quelquefois avec la sobriété. Le grand jeûne, dit S. Augustin, est l’abstinence des vices. Les Athlètes, pour se rendre plus robustes, vivoient dans une abstinence générale de tous les plaisirs. Dac. L’Eglise a enjoint aux Ecclésiastiques l’abstinence des femmes : elle a marqué aussi certains jours de jeûne, & d’abstinence. Il se dit aussi de la simple modération dans l’usage des alimens. On fait des abstinences par un pur régime de vivre, comme de vin, de salines, &c. La diète & l’abstinence sont nécessaires, pour rétablir l’estomac affoibli par la débauche.

Abstinence, signifie quelquefois une simple privation de manger de la chair. Abstinentia carnium. L’abstinence des viandes assaisonnée de dévotion, & accompagnée de la prière, est un des moyens les plus efficaces pour avancer notre sanctification. Boss. L’Eglise ordonne simplement l’abstinence le jour de Saint Marc, & non pas le jeûne. Les Mercredis sont des jours d’abstinence, chez plusieurs Religieux. Les dévots font aussi des abstinences, & des macérations volontaires.

ABSTINENT, ente, adj. Tempérant à l’égard du boire & du manger. Sobrius. Les Peuples du Midi sont plus abstinens que ceux du Septentrion.

Abstinent, s. m. Nom qu’on donna à certains Hérétiques qui s’éleverent dans les Gaules & en Espagne au 3e. siècle, pendant la persécution de Dioclétien & de Maximien, parce qu’ils blâmoient le mariage. Les Abstinens étoient les mêmes que les Hiéraclites, selon Baronius ; & selon d’autres c’étoient des Encratites, nom Grec qui signifie la même chose à peu-près qu’Abstinent. Quoi qu’il en soit, tout le monde convient que les Abstinens étoient une branche des Gnostiques & des Manichéens. Ils faisoient aussi profession de ne point manger de viande, comme étant de soi mauvaise, & ayant été créée par Satan. Voyez Philastrius hær. 83. Ces Hérétiques furent nommés Abstinens, à cause qu’ils s’abstenoient de l’usage du vin & de plusieurs viandes. God.

ABSTERGER, v. Act. Abstergere. Ce mot vient du Latin. Terme de Médecine & de Chirurgie. Purger, nettoyer une plaie, ou ulcère, c’est la nettoyer d’une quantité de pus. Cela se fait par le moyen des amers, comme l’aloës, la myrrhe, & les herbes vulnéraires, qui absorbent un acide lequel ronge les fibres, & tuent de petits vers qui se forment dans les ulcères, & les rendent difficiles à se sécher.

ABSTERSIF, ive, adj. Qui purge & nettoie. Smegmaticus, smecticus. Médicament, purgation abstersive. Smegma.

ABSTRACT, acte. Terme de Philosophie. Il est un peu barbare en François. Ce qu’on détache par la pensée de toute autre chose, afin d’en avoir une connoissance simple, & par lui-même. Species abstracta per mentem. La quantité est un terme abstract, quand on la considère en elle-même, & sans être attachée à un corps, quoiqu’elle ne puisse subsister naturellement sans lui, ni lui sans elle. La blancheur est un terme abstract, quand on la considère détachée d’un sujet. De la connoissance des abstracts on parvient à celle des concrets, qui est le terme opposé.

ABSTRACTION, s. f. C’est une action de l’esprit, par laquelle on considère quelque partie d’un tout, sans faire atten-


Tome I. D tion