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naire leur infligent une peine capitale. On appelle un double adultère, celui que deux personnes mariées commettent ensemble. Enfant né d’un double adultère. Les Grecs, & même toutes les autres Sociétés Chretiennes du Levant, sont dans cette pratique, que l’adultère rompt le lien du mariage ; ensorte qu’en ce cas-là, & même en plusieurs autres, le mari peut épouser une autre femme. Ils s’appuient pour ce qui est de l’adultère, sur ces paroles de Jesus-Christ au Chap. 19. de S. Matthieu v. 9. Quiconque répudie sa femme hors le cas d’adultère, & en épouse une autre, devient adultère. Ce fut pour cette raison que les Ambassadeurs de Venise présentèrent une Requête, afin qu’on trouvât quelque tempérament au Canon qu’on étoit prêt de publier contre ceux qui disoient que l’adultère rompoit le mariage. Ce qui fit agir la République en cette occasion, c’est qu’elle avoit dans sa dépendance les Grecs de Candie, de Corfou, de Zante, & de quelques autres lieux ; & ces Grecs sont tous dans un usage conforme à celui que le Concile vouloit condamner. On donna dans le Concile satisfaction aux Ambassadeurs de Venise, parce que leurs raisons furent trouvées bonnes, comme le Cardinal Palavicin en demeure d’accord dans son Histoire du Concile de Trente. Il faut néanmoins avouer que les Grecs & les autres Chrétiens d’Orient rompent trop facilement leurs mariages, sous prétexte de se conformer en cela aux Loix Canoniques & Civiles.

Adultère, se dit aussi de celui ou de celle qui commettent l’adultère. Adulter, Adultera. Un adultère public doit être privé de ses Bénéfices.

Faut-il que sur le front d’un profane adultère,
Brille de la vertu le sacré caractère ? Racin.

Solon croyoit que la plus grande peine qu’on pût ordonner contre les femmes adultères, étoit la honte publique. Le Mait. A Rome on mutiloit l’adultère surpris en flagrant délit ; & par cette punition le mari pourvoyoit à sa sureté pour l’avenir. Dac. Jesus-Christ ne voulut pas condamner la femme adultère. S. Thomas, Quest. 154. dit que ce mot vient, quòd aliquis accedat ad alteram. On disoit en vieux François, Avoultre, & on dit encore en Basse Bretagne Avoultre, pour signifier la même chose.

Les Astronomes appellent adultère du soleil & de la lune, leurs éclipses, quand elles se font en quelque manière contre les règles de l’astronomie, comme il arrive aux éclipses horisontales. Car quoique le soleil & la lune soient diamétralement opposés, ils ne laissent pas de paroître en même-temps sur l’horison. On en a vû une à Paris le 16. Juin 1666. On tient que de semblables éclipses doivent arriver tous les 19. ans.

ADULTÉRER. v. n. Commettre adultere. Adulterari, Adulterare. Ces deux personnes ont plusieurs fois adultéré ensemble. Celui qui convoite la femme d’autrui, a déjà adultéré dans son cœur. Ce mot n’est guère en usage.

ADULTÉRIN, ine. adj. Fils ou fille qui sont nés d’un adultère. Terme de droit dont on ne se sert guère que dans le barreau. Nothus, Notha. Les bâtards adultérins sont incapables de bénéfices. Les enfans adultérins sont plus odieux que ceux qui sont nés de personnes libres. Le Droit Romain leur refusoit même le nom d’enfans naturels, comme si la nature les désavoüoit.

AdVOCASSER. v. n. Faire la profession d’Avocat. Causas agere. On ne le dit point des Avocats célèbres, mais de ceux qui ont peu de pratique. Il y a long-temps qu’il avocasse, & meurt de faim. Ce mot est bas.

AdVOCASSERIE. s. f. Profession d’Avocat. Advocatio. On ne voit guère de gens s’enrichir aujourd’hui par l’Avocasserie. Il y a déja plusieurs années que cet homme s’adonne à l’Avocasserie. Ce mot est bas.

AdVOCAT. s. m. Homme savant en Jurisprudence, qui en vertu de ses licences & de sa matricule, plaide & défend de vive voix, ou par écrit, le droit des parties qui ont besoin de son assistance. Advocatus, causidicus ; causarum Actor. Avocat au Conseil, est celui qui fait tou-


tes les instructions des affaires du Conseil du Roi comme un Procureur. Litis ordinator in Consilio Regio. Un Avocat plaidant, celui qui s’applique à la plaidoirie. Causidicus, causarum Actor. Un Avocat consultant, celui qui se renferme à la consultation. Patronus de jure respondens. Cette distinction entre les Avocats plaidans, & les Avocats consultans, se rapporte à celle que mettoient les Romains entre les Avocats & les Jurisconsultes. Il y avoit seulement cette différence, que la fonction des Jurisconsultes, qui donnoient simplement leurs conseils, étoit distincte, & séparée de celle des Avocats. Les Jurisconsultes ne plaidoient point ; c’étoit une espèce de magistrature privée, & perpétuelle, principalement sous les premiers Empereurs. D’autre côté les Avocats ne devenoient point Jurisconsultes : au lieu qu’en France les Avocats deviennent Jurisconsultes en ce sens-là ; c’est-à-dire, qu’ayant acquis de l’expérience, & de la capacité dans la plaidoirie, & ne pouvant plus en soutenir le tumulte, & la fatigue, ils deviennent Avocats consultants. C’est la récompense de leurs travaux, & la retraite d’honneur de leur vieillesse. C’est pourquoi à l’audience des Parlemens, ils se placent sur les siéges inférieurs couverts de fleurs de lys, avec les Juges des Jurisdictions subalternes. Dans les anciennes Ordonnances ils sont nommés Avocats Conseillers ; Advocati consiliarii. Pour être reçu Avocat, il faut avoir pris ses licences dans une Faculté en Droit, après y avoir étudié trois ans, y avoir été examiné deux fois, & y avoir soutenu deux Thèses. Il faut prêter serment, & se faire immatriculer au Parlement où l’on veut plaider. Cicéron dit qu’un habile Avocat est comme l’Oracle que chacun va consulter. La Loi 14. du Code, Liv. 2. T. 7. appelle le métier d’Avocat une milice ; parce que les Avocats combattent pour la vie, & pour la fortune de ceux qui implorent le secours de leur éloquence. Les Espagnols de Cuba ne voulurent plus qu’il passât d’Avocats dans leur Isle ; ils les appellent Letrados : & ils obtinrent que ceux qui y étoient déja, ne plaideroient plus, disant qu’ils étoient cause de tous les débats & procès des Habitans. Herrera.

Dans les anciennes pratiques & styles des Cours, les Avocats ont été appellés Parliérs, ou Anparliérs. Le mot de Parliérs est encore en usage en quelques endroits de la Suisse, comme dans le Comté de Neuchâtel. Ils ont été aussi appellés Conteurs & Plaideurs.

Les Romains avoient une opinion honorable de la profession d’Avocat. Les siéges du barreau de Rome étoient remplis de Consuls, & de Sénateurs, qui se tenoient honorés de la qualité d’Avocat. Les mêmes voix qui commandoient aux Peuples, étoient aussi employées à les défendre. C’est pourquoi les Empereurs préférant la robe à l’épée, donnoient aux Avocats le titre de Comtes, & de Clarissimes ; & ; ils portoient si loin l’honneur qui étoit dû à l’excellence de cette profession, qu’on les désignoit par le nom d’Honorati. C’étoit encore par ce même principe d’estime qu’on les appelloit Patroni, comme si leurs cliens ne leur étoient pas moins obligés, que les affranchis à leurs maîtres, qui les avoient tirés de servitude. Enfin l’Empereur Théodose après avoir réuni dans sa Novelle, De postulando, tous les éloges imaginables, conclut, que les priviléges qu’il leur accorde, sont peu de chose pour une fonction si noble, & si nécessaire. Cette profession s’avilit dans la suite. Car pendant le temps de la République florissante, ceux qui aspiroient aux charges, & aux honneurs, plaidoient gratuitement, pour s’acquérir la bienveillance du Peuple, & se faire des cliens. Alors les Sénateurs eussent eu honte de rendre leur éloquence venale ; ils ne cherchoient que de la gloire, & de la réputation. Mais depuis que la faveur populaire ne servit plus à parvenir aux dignités, & que les Avocats ne furent plus récompensés par les charges, ils devinrent mercénaires. Le métier d’Avocat fut un métier lucratif ; & ils vendirent leur zèle, & leur colère, comme ils avoient fait dans les premiers temps. Les Avocats de Rome rançonnoient tellement leurs parties, que le Tribun Cincius fit une Loi qu’on appella de son nom, Cincia, afin de corriger cet abus ; elle défendoit aux Avocats de rien exiger de leurs cliens. Fredericus Brummerus a fait un ample Commentaire sur cette Loi. Il étoit


d’abord défendu aux Avocats de prendre aucuns présens pour plaider une cause. L’Empereur Auguste y ajoûta une peine ; & l’Empereur Claudius crut faire un grand coup, de les réduire à ne prendre pas plus de dix grands sesterces pour chaque cause, qui valoient 437. livres 10 sols de notre monnoie. Ménage cite un titre de Charlemagne tiré de Nauclerus, qui défend aux Avocats, quand ils viendront plaider, d’amener plus de 30. chevaux.

Advocat Général, est un Officier de Cour Souveraine, à qui les Avocats des parties communiquent les causes, où le Roi, & le Public, l’Eglise, & les Mineurs ont intérêt, & qui en pleine audience en rend compte à Messieurs les Présidens & les Conseillers, & qui même donne ses conclusions, après avoir oui les plaidoyers des Avocats des parties. Advocatus regius in supremo Senatu, ou Catholicus.

Advocat du Roi, est celui qui est Substitut de l’Avocat Général, & qui est employé dans une Jurisdiction qui relève d’un Parlement. Advocatus regius in inferiore Curia. L’Avocat du Roi conclut toujours à l’Audience, pour le Roi, pour le Public, pour les Mineurs. Sous la première & la seconde race de nos Rois, il n’est fait aucune mention d’Avocat du Roi, ou du Fisc en particulier ; mais il semble que tous les Avocats en général en exerçoient les fonctions.

Avocat Fiscal, est un Officier qui a été institué par l’Empereur Adrien, comme remarque Budée, pour défendre la cause du Fisc, non-seulement en la Chambre, mais aussi en tous les autres Tribunaux. Fisci Advocatus.

Avocat Consistorial, est un Officier de Cour de Rome créé pour y plaider sur les oppositions qu’on forme aux provisions des Bénéfices, qui étoient fort communes du temps des élections. Ils sont dix en nombre. Advocatus in Pontificio Consilio.

Avocat, ate, se dit figurément de celui ou de celle qui prend nos intérêts en main, & qui les défend. Patronus. Patrona. Quelques-uns croient qu’en ce sens il faut dire Avocat, & non pas Avocate. Je veux prendre la vérité pour mon Avocat. Ablanc. Cependant il semble que l’usage veuille que dans cette phrase on dise Avocate, & non pas Avocat. C’est pourquoi ceux qui ont eu le soin de la nouvelle édition de Lucien, après la mort d’Ablancourt, ont écrit ; Je veux prendre la vérité pour mon Avocate. On dit pareillement, la Sainte Vierge est l’Avocate des pécheurs. Dans les prières que l’Eglise offre pour nous à Marie, elle l’appelle Mère de miséricorde, refuge des pécheurs, porte du Ciel, notre Avocate. P. d’Ori.

On appelle aussi Avocate, la femme d’un Avocat. Cependant on ne le dit ordinairement que de la femme d’un Avocat Général, ou d’un Avocat du Roi, en y ajoûtant le mot de Madame. Ainsi on dit Madame l’Avocate Générale, Madame l’Avocate du Roi.

Il y avoit autrefois des Avocats pour défendre les droits de l’Eglise, tant par armes qu’en justice, qu’on a appellés plus communément Avouez. Voyez AVOUÉ.

On appelle proverbialement & ironiquement un Avocat qui manque de pratique, un Avocat à tort, & sans cause, un Avocat de causes perdues. Imperitus & iners Causidicus, Patronus sine patrocinio. On dit de même proverbialement un Avocat de balle, un Avocat de Pilate, par allusion à ce mot, Non invenio causam.

AdVOLER. v. n. Ce mot qui signifie, aller vîte pour se rendre en quelque lieu, est vieux, & tout-à-fait hors d’usage. Advolare. Mézerai s’en est servi : Mais lui étant advolé à Paris.

ADVOUÉ, s. m. C’étoit autrefois un patron, un défenseur des droits d’une Eglise. Bonorum Ecclesiae Patronus. Charlemagne prenoit le titre d’Avoué de S. Pièrre, & Protecteur de la ville de Rome ; & le Pape Léon III. lui envoya une bannière & des clefs, en lui donnant cette qualité. Il y avoit aussi des Avouez pour les Eglises Cathédrales, & pour les Abbayes ; même pour celles des filles. Les Vidames prenoient la qualité d’Avouez, & même les Historiens du VIIIe siècle confondent ces deux qualités ; & de-là vient que plusieurs séculiers d’Allemagne & Grands Seigneurs portent des mitres en cimier sur leurs Ecus, parce qu’ils avoient les qualités d’Avouez, ou d’Officiers des grandes Eglises. Ces Avouez étoient d’abord des Avocats qui défendoient les causes des Eglises. On leur donne aussi le nom d’Avouez des Moutiers ; c’est-à-dire, des Monastères. Ils étoient comme patrons,


E ij gardes,