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gneusement, vous étreindra le cœur dans une main glacée et terrible, puis le rejettera brisé. Prenez-la pour un diable, elle déploiera deux magnifiques ailes d’azur et une chevelure étoilée priez-la comme un ange elle vous montrera les cornes.

C’est que Flora Tristan est la superbe personnification du plus complet et du plus implacable, orgueil. Le Satan de Milton doit être mort de dépit depuis qu’elle est au monde. Si elle n’est pas Satan lui-même en progrès, elle est parvenue, à force de grandir dans la révolte, à la quiétude et à une sérénité de front qui la rend véritablement dangereuse aux âmes, car elle les force à la haïr ou à l’adorer.

Trop superbe pour être vaine, Mme Tristan s’impose elle-même en abjurant sa personnalité. Tout lui appartient : vos idées, vos travaux, votre personne, et elle n’en estime pas même la propriété. Vous n’êtes rien elle non plus : Dieu est tout, mais elle est tout en Dieu et Dieu est tout en elle. De grâce, n’allez lui résister en rien ; baissez le front devant l’auréole de femme qui l’entoure ; ne lui demandez la raison de rien ; aimez-la, à la grande et unique condition qu’elle ne vous aimera pas. Singulière condition, direz-vous ; et qui l’imposera ? elle ! — Non ; vous, si vous êtes