Page:Tristan Bernard - Contes de Pantruche.djvu/13

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Cependant, les puritains commençaient à le regarder d’un mauvais œil.

II

Alors il se dit : « Faisons taire les langues et prenons femme. »

Mais il s’agissait de s’assurer tout d’abord un enfant légitimé. Il entreprit donc la séduction d’une jeune fille très bien, et ne l’épousa qu’après qu’elle lui eut donné un petit garçon qui fut aux termes de la loi, un enfant légitimé. Puis il la rendit mère une seconde fois, pour avoir un enfant purement légitime.

Il vivait en paix, avec sa compagne, dans une petite maison de Neuilly. Autour de lui jouaient l’enfant adoptif, l’enfant naturel, le légitimé, le légitime, voire l’adultérin, que lui envoyait souvent la notairesse, et aussi Gaspard, l’enfant incestueux, qui l’appelait papa le lundi, le mercredi, le samedi, et mon oncle les autres jours de la semaine.

III

Lartilleur n’était pas complètement heureux, car souvent la santé de ses enfants le mettait dans des transes douloureuses. Il craignait qu’un malheur n’arrivât à l’enfant naturel et ne dépareillât ainsi sa collection.

Vivant en état de mariage, il ne pouvait donner le jour qu’à des enfants légitimes ou adultérins, et, pour remplacer, à l’occasion son bâtard, il eût été contraint de se séparer de sa femme (par les moyens toujours pénibles du divorce ou du meurtre).

Quant à la mort de l’enfant adoptif, c’était un cauchemar pour lui que d’y songer. Pour se trouver à nouveau dans les