Page:Tristan Bernard - Contes de Pantruche.djvu/60

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« Voyez-vous, monsieur, le grand vice du règlement, c’est la répartition des jetons de présence aux séances du jeudi. Vous savez que, tous les jeudis, une somme de 240 francs est partagée entre les académiciens présents.

« Vous connaissez également cette anecdote, que rapporte Daudet. Le jour de la mort de Louis XVI, les académiciens restèrent chez eux, à l’exception d’un seul, le nommé Senard, qui se présenta à propos et palpa sans broncher la forte somme.

« Ce triste exemple ne fut pas perdu. Toutes les fois que par la suite, une grande tragédie politique s’est dénouée le jeudi, chaque académicien a conçu le projet, dans son for intérieur, de renouveler le coup de Senard. Et ces jours-là, l’Académie s’est trouvée au grand complet.

« Quand les académiciens sont trente en séance, ils touchent donc chacun huit francs ; s’ils ne sont que vingt, le jeton est de douze francs. Aussi leurs efforts tendent-ils à empêcher leurs collègues de se rendre aux séances du jeudi, par toutes sortes