Page:Tristan L’Hermite - Les Amours de Tristan, 1638.djvu/192

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Ainſi perſecuté des cruautez d’Amour
Mon eſprit ſe conſume en des peines ſans nombre :
Si mon dueil au matin commence auec le iour,
      Il croiſt le ſoir auecque l’ombre.
Et i’ay touſiours l’humeur ſi chagrine & ſi ſombre
      Que ſur la Terre & dans les Cieux
Ie ne voy point d’obiects qui ne bleſſent mes yeux.

Außi tout eſt ſenſible à mon affliction ;
Là bas dedans ces prez l’herbe en eſt preſque morte :
Ces troncs ne ſont ſechez que de compaßion
      Des deſplaiſirs que ie ſuporte.
Les vents en ſont muets, & d’vne aimable ſorte,
     Echo taſche à m’en conſoler
En chaque ſolitude où ie vay luy parler.

Les Nimphes que Diane attire dans les bois
Abhorrant des mortels les prophanes aproches ;
M’ont voulu demander la rigueur de vos loix
      Pour vous en faire des reproches ;
Et celle d’vn ruiſſeau qui coule entre des roches
      Admirant l’excez de ma foy,
Murmure du meſpris que vous auez pour moy.