Page:Trollope - La Pupille.djvu/177

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pour tout ce qui n’est pas l’objet aimé. Miss Brandenberry, qui ne dansait pas, était uniquement préoccupée par un étranger, d’une complexion très-brune, qui se promenait au bras du comte de Broughton, père de lord Thelwell, et qui fixait aussi l’attention de tous les assistants par sa figure et ses manières singulières.

Cet étranger, très-noir de peau, était complètement chauve, et le peu de cheveux qui lui restaient derrière la tête étaient déjà grisonnants ; il portait une longue et fine moustache qui lui donnait l’air d’un Chinois, et accompagnait chacune de ses paroles de petits gestes prompts et secs qui achevaient de le rendre fort étrange. Enfin, quel qu’il fût, et chacun, à commencer par miss Brandenberry, grillait du désir de le savoir, ce devait être un personnage important, puisque son noble interlocuteur, le comte de Broughton, lui accordait toute son attention et se penchait vers lui pour ne pas perdre un mot de sa conversation. Miss Brandenberry, ne pouvant satisfaire sa curiosité, se disposait à aller chercher des détails et des renseignements auprès de ses connaissances, lorsque le quadrille finit et ramena Sophie et Florence à leur place. Marguerite se crut obligée de rester pour faire sa cour et s’assurer que Sophie ne lui en voulait pas ; mais, ô bonheur ! lord Broughton s’approchait, ainsi que lord Thelwell et l’étranger, de la place où les habitants de Thorpe-Combe étaient assis.

« Il me semble qu’ils s’approchent de nous, murmura miss Brandenberry ; auriez-vous appris quel est cet étranger, miss Florence, et pourriez… ? »

Cette question fut interrompue par lord Thelwell, qui s’adressait à Sophie en ces termes :

« Voulez-vous me permettre, miss Martin Thorpe, de vous présenter mon père, lord Broughton ? »