Page:Trollope - La Pupille.djvu/260

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Ce passage de la lettre suffira pour montrer l’esprit d’Elfreda et celui de son oncle, qui trouvait sa correspondance agréable, divertissante et intéressante.

Quand même sir Charles n’aurait pas approuvé la lenteur un peu trop prolongée avec laquelle M. Thorpe conduisait ses affaires, il n’aurait pas eu le courage de s’en plaindre bien vivement, car ses journées se passaient près de Florence, et leur amour sincère et pur suffisait à leurs cœurs.

Tantôt installés tous deux avec la famille dans le pavillon de plaisance que sir Charles avait fait orner de son mieux, tandis que mistress Heathcote travaillait et que le major faisait lire ses fils, les deux amoureux, retirés dans une embrasure de fenêtre, parlaient de leur amour ; tantôt, assis sur l’herbe, ils causaient à voix basse pour ne pas effaroucher les poissons que le major cherchait à attraper au bord de la rivière, et jamais la coquetterie abominable dont parlait miss Wilkins à son oncle ne s’était mêlée à leurs causeries de chaque jour. Cette intimité choquait toute la société, car personne ne connaissait leurs projets, et ils ne voulaient toujours pas en parler à qui que ce fût.

Algernon partageait son temps entre la lecture et la promenade, et M. Jenkins, son nouvel ami, lui faisait visiter le pays. Mais ces attentions de l’étranger n’inquiétaient nullement Sophie, qui était très-convaincue que M. Jenkins la préférait au reste de la famille. Et quant aux cadeaux qu’il avait offerts à ses cousines et à Algernon, ils ne faisaient que lui prouver plus clairement qu’il était très-riche et pouvait être très-généreux.

Tout le monde était donc heureux et content. Sir Charles réservait ses matinées, mais dînait tous les jours à Thorpe-Combe ; M. et miss Brandenberry avaient été invités deux fois ; M. Jenkins s’était trouvé indisposé