Page:Trollope - La Pupille.djvu/263

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M. Jenkins ! répéta Sophie plus doucement ; c’est bien alors, laissez-nous.

— Est-ce drôle ! reprit miss Wilkins ; il est certainement bien aimable et bien généreux ; mais quel homme bizarre, n’est-ce pas, chère Sophie ?

— Je trouve M. Jenkins si aimable que tout ce qu’il fait me paraît très-naturel ; si réellement il est extravagant, je ne m’en suis jamais aperçue. Je ne connais personne qui me plaise autant que lui. Quant à cette peinture, je devine pourquoi il l’a fait descendre. Dans sa visite à travers la maison, il aura reconnu ce portrait pour celui du fils de son ami, mon oncle Thorpe, et il désire probablement le voir de plus près ; je suis même ravie de cette découverte, puisqu’elle lui a procuré un instant de plaisir. »

Cette explication parut tout à fait naturelle aux miss Wilkins ; mais mistress Heathcote, se rappelant l’anecdote qu’elle avait racontée à M. Jenkins quelques jours auparavant, se douta bien que ce n’était pas sans motifs que l’ancien ami des Thorpe avait fait descendre le vieux tableau. Elle supposa qu’il avait l’intention de faire une tirade sur les modes, en trouvant moyen de dire quelque chose sur le grand col et la coiffure représentés dans le portrait. Cependant l’excellente dame ne dit rien, pour ne pas tourmenter Sophie qui se conduisait beaucoup mieux envers elle, et avait parlé d’aller aux bains de mer avec toute la famille pour la santé des enfants.

M. Jenkins entra le dernier dans le salon, où il trouva toute la société groupée autour du portrait. En voyant le tableau, sir Charles comprit que le moment décisif était arrivé ; aussi alla-t-il s’asseoir près de Florence, afin d’assister à la scène qui devait se passer sans y prendre part en aucune façon. Algernon et sa mère s’écartèrent aussi et s’assirent l’un auprès de l’autre pour écouter