Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/171

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de ma poche. C’est-à-dire qu’elles ont payé leur note partout, et je ne leur ai rien prêté ; mais vous savez qu’il est bien difficile à un homme de voyager comme cela familièrement avec des femmes sans que la bourse s’en ressente. On est tenté de faire pour elles mille choses qu’on ne ferait pas pour soi, ou qu’elles-mêmes ne s’accorderaient pas si elles devaient payer les violons.

C’est ici le lieu de placer une petite morale très-utile.

Mesdames, regardez-y à deux fois avant de vous lier en voyage avec des messieurs inconnus. Il ne vous serait point agréable qu’on parlât de vous comme cet homme parlait de mademoiselle Baker et de sa nièce. La vérité, c’est qu’il n’y eut jamais au monde de femme plus exacte dans les affaires d’argent que la pauvre mademoiselle Baker : elle n’aurait pas permis à Mac-Gabbery de lui acheter en route pour une piastre d’oranges seulement. De plus, il n’avait pas été leur seul compagnon de voyage : M. et madame Hunter avaient été de la société à laquelle on lui avait simplement permis de s’adjoindre.

— À votre place, je leur battrais froid, ajouta M. Cruse ; et quant à ce fat insupportable, je ne m’en occuperais que pour faire semblant de ne pas le reconnaître.

M. Mac-Gabbery finit par promettre de suivre le conseil de son ami, et ce fut grâce à cette sage résolution que le pique-nique de mademoiselle Todd se termina sans effusion de sang.