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Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/175

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plus facile de mettre en œuvre la bonté, si le germe en existe chez eux. Le cœur du prêtre devra être plus ouvert à la compassion, ce me semble, que celui d’un avocat ou d’un avoué.

— Je ne comprends pas, au juste, ce que vous entendez par la compassion.

— J’entends… dit Bertram, puis il s’arrêta ; car il ne savait trop comment expliquer sa pensée à cette jeune fille, et il ne se sentait pas bien sûr qu’elle le comprendrait quand il aurait parlé. Or, s’il faut tout dire, quelque penchant qu’il éprouvât pour une vie de sainteté, il ressentait un attrait au moins égal pour sa compagne.

— Il me semble qu’un homme doit toujours choisir la profession qui le mènera le plus loin. Vous avez le droit d’aspirer à une haute position, et, à votre place, je n’irais certes pas m’enterrer dans une cure de campagne.

Ce que disait à Bertram cette fille de vingt ans lui faisait bien plus d’impression que les préceptes pleins d’expérience de son père. Et pourtant les conseils de l’un, comme les avis de l’autre, avaient leur influence, car la bonne semence était tombée chez lui sur un sol bien peu favorable.

Ils s’assirent, et gardèrent le silence pendant quelques instants. Bertram regardait au loin vers le mont Moriah, et songeait aux tables des changeurs renversées dans le Temple, tandis que Caroline Waddington regardait simplement le soleil couchant. Elle aimait et elle comprenait le beau dans l’ordre matériel, mais