Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/335

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que maintenant il ne pouvait revenir, ayant promis de rester quelque temps avec son père. Sir Lionel était souffrant et les eaux de Vichy lui avaient été recommandées. Il irait donc à Vichy avec lui et ne pourrait être de retour avant le mois d’août. Ses projets pour la fin de l’été n’étaient pas encore bien arrêtés, mais mademoiselle Baker pouvait compter qu’il ne serait pas longtemps à Londres, sans aller à Littlebath.

À Harcourt il écrivit très-brièvement. Il lui disait qu’il lui était fort reconnaissant de l’intérêt qu’il portait à mademoiselle Waddington, et des attentions qu’il avait pour mademoiselle Baker. C’était là à peu près tout. Dans toute la lettre il n’y avait pas un mot de colère, et pourtant l’ami Harcourt, en la lisant, n’eut pas de peine à comprendre que George était très-fâché.

Mais ce fut sur sa future que Bertram épancha toute sa colère. Jamais auparavant il ne l’avait grondée, jamais il ne lui avait écrit d’un ton irrité. Mais pour le coup, il déborda. Une lettre dictée par la colère est cent fois plus cruelle que tout ce que l’on peut dire de vive voix, — surtout quand celui qui écrit nous est cher. Elle est moins facile à pardonner que le discours le plus irrité. Les mots restent là brûlants, ineffaçables, ne pouvant être ni expliqués ni atténués. Aucune caresse ne vient les faire oublier, aucune parole de tendresse, aucune de ces bonnes paroles qui suivent souvent de si près la colère parlée ne vient les adoucir. Dieu nous préserve de ces lettres grondeuses ! Elles ne devraient jamais être adressées qu’à des éco-