quoi qu’il l’aimât encore et malgré tout ce qu’il lui reprochait. Voici ce qu’il avait voulu lui faire comprendre, mais elle n’avait pas compris…
— Et maintenant, puis-je partir ? dit-elle en se levant. La rougeur de la honte était passée, et, si soumises que fussent ses paroles, elle était redevenue Junon. — Et maintenant, puis-je partir ?
— Partir maintenant ? Oui ; sans doute. C’est-à-dire je puis partir ; c’est cela que vous voulez dire. Oui, je pense que je ferais mieux de partir. Il y avait un instant à peine, il était ivre de colère, et sa voix avait été résolue et impérieuse, mais maintenant elle était redevenue douce. En ce moment, si Caroline eût pu se montrer tendre, il aurait cédé. Mais elle ne savait pas être tendre. C’était une Junon, comme je l’ai dit. Bien qu’elle sût, à n’en pouvoir douter, que son cœur se briserait quand George serait parti, elle ne pouvait se résoudre à user de douceur féminine. Elle ne savait pas lui dire qu’elle avait mal agi parce qu’elle avait été malheureuse, parce qu’il l’avait laissée seule, parce qu’elle avait été égarée par son amour même ; elle ne savait pas lui dire cela, et puis lui prendre la main et lui promettre, s’il voulait ne plus la quitter, qu’elle ne commettrait plus jamais une semblable faute. Si elle avait su faire cela, en un instant sa tête eût été appuyée sur l’épaule de George, ce bras aimé eût entouré sa taille, et avant un quart d’heure, on aurait annoncé à mademoiselle Baker, qui attendait là-haut dans sa chambre, que le jour du mariage était fixé.
Mademoiselle Baker devait apprendre une tout autre