Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/173

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— Chère Sarah !…

— Ha ! ha ! ha ! Ha ! ha ! ha ! fit mademoiselle Todd en laissant retentir son terrible rire qui la secouait tout entière, pendant qu’elle se rejetait dans le coin du canapé où elle était assise. Cela n’était pas poli de sa part, et sir Lionel en fut naturellement froissé. Quand on appelle pour la première fois la dame de ses pensées de son nom de baptême, il n’est point agréable de voir cette petite liberté tournée en ridicule : on aimerait infiniment mieux se la voir reprocher comme un crime.

— Ha ! ha ! ha ! continua mademoiselle Todd en éclatant de nouveau, et de plus en plus fort ; je crois qu’on ne m’a jamais appelée comme cela depuis le jour de ma naissance. Cela semble si drôle. Sarah ! Ha ! ha ! ha !

Sir Lionel resta muet. Que dire quand on accueillait ainsi ses petites tendresses ?

— Appelez-moi Sally, si vous y tenez, sir Lionel. Mes frères, mes sœurs, mes oncles, mes tantes, tout ce monde-là me nomme et m’a toujours nommée Sally. Mais Sarah ? Ha ! ha ! ha ! Voyons ! si vous m’appeliez Sally, sir Lionel ?

Sir Lionel fit un effort, mais il put parvenir à la nommer Sally ; ses lèvres se refusaient, pour l’instant, à former ce son.

Pourtant, le sujet était entamé, et il devait parler. Si un jour elle devenait sa femme, il l’appellerait Sarah ou Sally, ou il lui donnerait tout autre nom que lui inspirerait le sentiment du moment. Quand ce