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LE CONTEUR BRETON

jeta sur le nez une barrique qui m’éblouit, si bien que je vis briller trois soleils et cent étoiles. S’il eût trouvé (sous sa main) une souche de vieux chêne ou quelque roche, c’en était fait de moi aussi.

— Prends un peu d’onguent, mon fiston, dit le vieil ogre, et fais un petit somme, et avant peu tu en seras quitte et guéri. Tu as eu plus de peur que de mal. Mais moi, je suis bien à plaindre, car que deviendrai-je vieux comme je suis, si tu venais à me manquer ? Hâte-toi, mon pauvre enfant, de réparer tes forces, car je sens l’odeur de chrétien. Je n’aime pas beaucoup la chair des païens ; tout à l’heure j’aurai mieux, je pense, dit le vieil ogre en se léchant les babines avec la langue. Ces deux prises-ci ne sont bonnes que pour les trois chiens de garde qui sont à jeûner depuis quelque temps.

Ces trois chiens d’attache n’avaient cessé de grogner depuis le retour du géant ; ils étaient pressés de sauter sur un morceau de viande, ou peut-être furieux contre Jean au bâton de fer. Mais ils étaient bien attachés chacun à une chaîne d’acier très-forte et blanche comme de l’argent, tant ils tournaient et viraient autour du point d’attache.

Jean, voyant qu’il en avait pour quelque temps avant que le géant fût défatigué, alla se promener autour du château pour connaître les êtres de ces lieux, et chercher comment s’y prendre pour arriver jusqu’à la princesse qui était dans le château, d’après ce qu’avait dit le vieil ogre au géant. Et Jean, partout où il passait, frappait la terre