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LE CONTEUR BRETON

vous le dis. Celui-ci, au lieu de se retirer, se précipita avec célérité, croyant pouvoir l’em­brasser, lorsque des flammes l’enveloppèrent et le brûlèrent à l’instant sur le lieu. Son ami, qui le regardait, fut sur le point d’être brûlé aussi.

Le monstre aussitôt va trouver la jeune fille, la saisit et la jette sur son dos comme un sac de mouture ; et de là il part avec elle comme un diable qui emporte sa proie. Il ne fut pas long­temps à faire le trajet, et la jeune fille, qui était tombée en défaillance, ne reprit ses sens que lors­qu’elle fut dans sa chambre. Là, elle fut servie comme elle l’avait été précédemment, excepté que sa petite bête ne venait pas la voir, au moment de Son repas. Quinze jours se passèrent ainsi.

Après ces quinze jours cependant, la jeune fille s’étonnait et s’affligeait, comme vous pouvez le penser, lorsque revint sa petite bête. Celle-ci lui demanda si elle n’était pas inquiète. — Si fait, dit­-elle, j’ai été fort inquiète, en voyant que vous ne veniez plus me voir. — Je sais que ce que tu dis est vrai, et comme je n’avais rien à te reprocher, pour ce qui est arrivé, je suis resté en bas pour laisser calmer la colère que je ressentais, car sans cela ; dit la bête, je n’eusse peut-être pas pu m’em­pêcher de te tuer. Celle-ci, cette jeune fille, n’était pas sotte, il s’en faut ; aussi voyait-elle bien que si le monstre lui parlait ainsi, ce n’était que parce qu’elle en était aimée, et qu’il était un peu jaloux. C’est pourquoi elle ne s’effraya pas de ses paroles, et elle eut en lui autant de confiance qu’aupa­ravant.