Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/284

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qu’il recevrait sous le régime de la liberté. Le propriétaire ne peut non plus prétendre à la même rente.

La première de ces lettres n’est guère qu’un avant-propos. L’auteur cherche à persuader à l’abbé Terray que la liberté du commerce des grains est le seul moyen un peu efficace d’empêcher les disettes, mais il ne le prouve pas encore.

Il paraît que la deuxième, la troisième et la quatrième de ces lettres entraient plus avant dans la question. Malheureusement elles sont perdues, et Dupont de Nemours n’en a guère donné que le sommaire, et une analyse succincte des arguments dont Turgot s’est probablement servi pour développer sa proposition.

Du temps de Turgot, on savait à peine l’idée qui devait s’attacher au mot entrepôt, et cependant nous voyons cet homme de bien provoquer déjà, comme remède aux caprices des saisons, des magasins privés, ouverts à tous, et où les frais de manutention devraient être amoindris autant que possible en raison des masses. Turgot repousse en même temps l’intervention de l’État dans ces réserves ; il déduit les raisons qu’il en a. Or, ces deux idées sont aujourd’hui encore les seules justes, les seules rationnelles, et l’expérience a justifié toutes les prévisions de Turgot.

Les entrepôts internationaux même, qui n’existent pas encore et que les hommes sensés appellent de tous leurs vœux, ont été entrevus par l’auteur.

Nous n’entrerons pas ici dans la discussion des principes sur lesquels se base Turgot pour défendre la liberté du commerce des grains. Il y répète ce qu’il a dit déjà dans son Mémoire Sur la formation des richesses, et, cette fois comme alors, le vrai se trouve accompagné du faux. Ainsi c’était une idée fixe chez les physiocrates, une idée préconçue plutôt que déduite, que tout impôt, quel qu’il soit, tombe en définitive sur les propriétaires du sol.

Leur raisonnement se réduit à ceci : « La terre produit tout. L’impôt est perçu sur la consommation ; or, le consommateur imposé consomme moins ; donc le revenu du producteur se ressent de cet impôt, car il y a diminution de consommation. » C’est, on le voit, pousser un peu loin les conséquences.

Il n’est malheureusement que trop prouvé que l’impôt de consommation tombe sur le consommateur, et que les prix des denrées augmentent exactement en raison de cet impôt ; cela est évident.