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ÉLOGE DE GOURNAY.


LETTRE DE TURGOT À MARMONTEL.
À Paris, ce 22 juillet 1759.

Je n’ai point oublié, monsieur, la note que je vous ai promise sur feu M. de Gournay. J’avais même compté vous la remettre lundi dernier chez Mme Geoffrin ; mais ne vous ayant point trouvé et ne vous croyant pas d’ailleurs très-pressé, je l’ai rapportée chez moi, dans l’idée que j’aurais peut-être le temps d’achever l’ébauche de l’éloge que je voudrais faire de cet excellent citoyen.

Puisque vous n’avez pas le temps d’attendre, je vous en envoie les traits principaux, esquissés trop à la hâte, mais qui pourront vous aider à le peindre, et que vous emploierez sûrement d’une manière beaucoup plus avantageuse pour sa gloire que je n’aurais pu le faire.

Vous connaissez mon attachement.


Jean-Claude-Marie Vincent, seigneur de Gournay, conseiller honoraire au grand conseil, intendant honoraire du commerce, est mort à Paris le 27 juin dernier (1759), âge de quarante-sept ans.

Il était né à Saint-Malo, au mois de mai 1712, de Claude Vincent, l’un des plus considérables négociants de cette ville, et secrétaire du roi.

Ses parents le destinèrent au commerce et l’envoyèrent à Cadix en 1729, à peine âgé de dix-sept ans.

Abandonné de si bonne heure à sa propre conduite, il sut se garantir des écueils et de la dissipation trop ordinaires à cet âge, et pendant tout le temps qu’il habita Cadix, sa vie fut partagée entre l’étude, les travaux de son état, les relations sans nombre qu’exigeait son commerce et celles que son mérite personnel ne tarda pas à lui procurer.

Son active application lui fit trouver le temps d’enrichir son esprit d’une foule de connaissances utiles, et de ne pas même négliger celles