Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/726

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toute l’étendue de ses bontés. Nous sentons que d’autres provinces les solliciteront, et que quelques-unes y ont des droits que nous sommes loin de combattre. Mais nous oserons représenter que les provinces qui ont souffert l’année dernière n’ont pas éprouvé une misère aussi forte que celle du Limousin, et surtout que la misère n’y a ni commencé d’aussi bonne heure, ni duré aussi longtemps ; que la plupart d’entre elles seront cette année dans l’abondance ; que plusieurs de celles qui souffriront cette année n’ont point souffert l’année dernière. Le Limousin est peut-être la seule sur laquelle le fléau de la disette se soit également appesanti pendant deux années entières. C’est en même temps celle qui est, par sa position au milieu des terres, la plus éloignée de tout secours, sans canaux, sans rivières navigables, sans chemins ouverts dans la partie la plus affligée, presque sans manufactures et sans commerce. C’est en même temps une de celles où les impositions sont habituellement les plus fortes, où les recouvrements sont de temps immémorial le plus arréragés ; nous osons croire que tant de motifs lui donnent des droits aux grâces du roi qu’aucune province ne peut lui disputer. Serait-il donc injuste de verser sur elle, dans sa détresse, une partie du moins-imposé que, dans des temps plus heureux, le roi accorde à des provinces plus riches, et qui du moins, cette année, n’ont essuyé aucun accident extraordinaire ? Nous osons espérer.

Nous ne parlerons point ici des secours d’autres genres qui seront encore indispensables pour assurer les approvisionnements et pourvoir à la subsistance des pauvres, en leur procurant des secours et du travail, ni même des mesures à prendre pour adoucir la rigueur des recouvrements ; nous nous réservons d’écrire en particulier sur cet objet à M. le contrôleur-général. Nous nous bornons, quant à présent, à mettre sous les yeux du roi l’état, nous osons dire désespéré, d’une partie de ses enfants, et le calcul non pas de leurs besoins, mais de ce dont il paraît nécessairement indispensable de les soulager. Ce calcul, que nous croyons avoir fait en toute rigueur, monte à 900,000 livres.


Observations générales à la suite de l’état des récoltes de 1770.

Art. I. Sur ce qui reste des récoltes précédentes. — On a déjà observé, dans le premier état envoyé au mois de juillet, que la