Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/163

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— Ainsi, dit le jeune homme, vous voulez rester à baguenauder ici, tandis que votre ami qui est blessé gît là-bas dans la forêt. Faites comme vous voudrez.

Le roi changea soudainement de langage.

— Blessé, dites-vous ? s’écria-t-il. Et qui a osé porter la main sur lui ? Mais nous verrons cela plus tard. Allons vite, allons vite. Plus vite ! vous dis-je. Vous êtes donc chaussé de plomb ? Blessé ! Ah ! quand celui qui l’a mis dans cet état serait fils de duc, il s’en repentira.

Il y avait une certaine distance à parcourir pour arriver à la forêt ; mais cet espace fut rapidement franchi. Le jeune homme regardait partout avec circonspection ; à la fin il aperçut une branche d’arbre fichée en terre et portant au haut un bout de guenille. Il eut l’air de se reconnaître et entra dans la forêt, cherchant attentivement des branches d’arbre ainsi disposées de loin en loin et mises là évidemment pour servir de repère jusqu’au but qu’il voulait atteindre.

Ils arrivèrent à une clairière, où se trouvaient les débris d’une ferme incendiée, et tout près de là une vieille grange qui tombait en ruines. Tout paraissait désert et silencieux en cet endroit.

Le jeune homme pénétra dans la grange. Le roi marchait précipitamment derrière lui.

La grange était vide. Le roi jeta sur son compagnon un regard surpris et soupçonneux :

— Où est-il ?

Un gros rire moqueur lui répondit.

Le roi entra en fureur. Il saisit une bûche et allait assommer son guide, lorsqu’un autre rire moqueur frappa son oreille. Il se retourna et vit l’infirme qui les avait suivis depuis le pont.