Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/44

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Le médecin s’inclina profondément et répondit :

— Je suis absolument de votre avis, sire, et j’ai l’intime conviction que Votre Majesté a touché le mal du doigt.

Le roi se montra heureux de cet encouragement qui venait d’une si grande autorité, et continua avec assurance :

— Suivez-moi bien, je vais compléter l’expérience.

Il questionna Tom en français. Tom resta coi, embarrassé sous les regards qui s’attachaient sur lui ; puis il dit timidement :

— Que Votre Majesté me pardonne ; je ne comprends pas cette langue.

Le roi se laissa lourdement retomber en arrière. Les médecins coururent à lui, mais il les écarta de la main :

— Rassurez-vous, dit-il, ce n’est rien qu’une petite syncope. Soulevez-moi. Là, très bien, cela suffit. Viens ici, mon enfant, repose ta pauvre tête malade sur le cœur de ton père, et sois calme. Tu iras mieux bientôt : ce n’est qu’un accès, cela passera. Ne crains point, cela passera.

Ensuite il se tourna vers l’assistance ; ses traits avaient perdu leur expression de douceur ; des éclairs sinistres commençaient à briller dans ses yeux.

— Écoutez, fit-il impérieusement, mon fils que voici est fou, mais ce n’est qu’une folie passagère. C’est l’excès des études qui en est cause, et peut-être aussi un peu trop d’assujettissement. Vous allez me jeter tous ses livres et me cesser ses leçons. Vous imaginerez des plaisirs, des distractions, des divertissements qui lui rendent la santé.

Il se redressa autant qu’il put et il ajouta avec fermeté :