Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/70

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où des torches allumées mariaient maintenant l’éclat de leurs flammes rutilantes aux scintillations des lanternes, s’étaient dressés debout des myriades de gens, tous tournés vers le palais.

Une file de quarante ou cinquante barques de cérémonie glissaient en amont vers le perron. Elles étaient richement dorées et inclinaient avec grâce tantôt leurs proues élevées, tantôt leurs poupes légères, ornées d’admirables sculptures. Quelques-unes étaient élégamment décorées et portaient des bannières, des flammes, des pavillons ; d’autres se cachaient presque entièrement sous des dais de drap d’or, sous des tentes en tapisseries de haute lisse, fabriquées alors à Arras, et chargées d’armoiries brodées ; d’autres arboraient des centaines de petits drapeaux de soie garnis de grelots d’argent, qui résonnaient joyeusement à chaque caresse du vent ; d’autres, plus superbes, appartenant aux gentilshommes que leurs dignités mettaient en rapport direct avec le prince, laissaient flotter au fil de l’eau des quantités de boucliers et d’écus suspendus côte à côte avec une symétrie pittoresque, et donnaient à épeler, sur leurs magnifiques blasons, les plus illustres devises, les plus nobles armes peintes de l’armorial d’Angleterre. Chacune de ces barques de cérémonie était remorquée par un bateau à rames, portant, outre les rameurs, un corps de musiciens et un certain nombre d’hommes d’armes, le morion en tête, la poitrine couverte d’une cuirasse étincelante.

Une troupe de hallebardiers, qui devaient servir d’avant-garde au cortège, vint alors s’échelonner sur le perron. Ils avaient pour coiffure une toque en velours coquettement piquée au côté d’une rose en argent, pour vêtements de grandes chausses rayées