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LES AVENTURES DE TOM SAWYER.

Sous la croix, tu te rappelles, hein ? C’est à deux pieds de ce rocher que j’ai vu arriver Joe l’Indien.

Huck contempla un instant le signe mystique, puis il s’écria d’une voix tremblante :

— Tom, allons-nous-en !

— Nous en aller et abandonner le trésor ?

— Oui. Le fantôme de Joe l’Indien rôde par ici, pour sûr.

— Allons donc, Huck ! S’il rôde quelque part, c’est à l’endroit où il est mort — bien loin de la place où nous sommes.

— Pas du tout. Il doit errer autour de l’argent. Tu connais aussi bien que moi les habitudes des revenants.

Tom commença à craindre que son ami n’eût raison, et il ne se sentit pas rassuré ; mais bientôt ses appréhensions se calmèrent.

— Nous sommes bien bêtes de nous effrayer. Le fantôme de Joe l’Indien ne se montrera jamais près d’un endroit où il y a une croix.

— C’est juste, dit Huck, convaincu par ce raisonnement.

Le grand rocher se dressait à l’entrée d’une salle peu spacieuse et humide où quatre couloirs aboutissaient. Dans un de ces passages, le plus rapproché de la base du rocher, on découvrit un renfoncement naturel qui contenait plusieurs couvertures, une vieille bretelle et des os rongés ; mais nos chercheurs eurent beau fouiller, le trésor n’était pas là.

— Il a dit sous la croix’, s’écria Tom. Eh bien, il me semble que nous sommes aussi près que possible du but. Pour cacher quelque chose sous le rocher, il aurait fallu le soulever, ce qui n’eût pas été facile !

Ils continuèrent en vain leurs fouilles et s’assirent découragés. Huck paraissait de mauvaise humeur. Tom réfléchissait.

— Il me vient une idée, dit-il enfin. J’ai remarqué des traces de pas et des gouttes de suif par terre d’un côté du rocher ; elles n’y sont pas pour rien : creusons sous la pierre et sous la croix.