Page:Twain - Un pari de milliardaires, et autres nouvelles.djvu/101

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le seul côté bizarre est d’avoir pressenti cette rencontre.

J’ai si souvent cassé du sucre sur le dos des absents et découvert ensuite, à ma grande confusion, que je parlais devant leurs parents, que je suis devenu superstitieux à ce sujet, et que maintenant je tiens ma langue. On se sent si bête après une gaffe de cette espèce !

Constamment, nous parlons de gens qui au même instant surgissent devant nous. Nous rions en disant : « Lorsqu’on parle du loup, etc. » ; nous n’y faisons plus attention, et ne voyons là qu’une simple coïncidence. C’est une manière commode de donner une solution à un problème grave et complexe, et de mettre cette particularité sur le compte d’une coïncidence banale.

J’arrive maintenant à la chose la plus singulière qui me soit arrivée. Il y a deux ou trois ans, j’étais couché paresseusement un matin. C’était le deux mars — lorsque, subitement, une idée me traversa l’esprit et s’y implanta avec une telle insistance que toutes mes autres pensées s’évanouirent devant elle. Cette idée, accapareuse de mon cerveau, semblait simple au premier abord : je pensais tout uniment qu’il était temps de préparer un livre à mettre en vente, un livre sensationnel qui offrirait un intérêt parti-