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Page:Twain - Un pari de milliardaires, et autres nouvelles.djvu/139

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des sacoches et des guides sur les genoux. Il y avait quatre heures qu’ils étaient là !

Et ils m’attendaient, ils m’at-ten-daient !…

Je compris que seul, un tour de force brillant, heureusement exécuté, et désopilant, pouvait rompre la glace et créer une diversion en ma faveur ; aussi je lançai mon chapeau au beau milieu d’eux, et, sautant après, dans une preste cabriole, je m’écriai, plein de gaîté :

— Ah ! ah !… nous voici au complet, M. Merryman !

Le plus profond silence remplaça les applaudissements sur lesquels je comptais.

Force me fut donc de m’expliquer, quoique mon assurance, assez mal assise jusqu’ici, vînt de recevoir un rude choc, une douche plutôt glacée. La mort dans l’âme, j’essayais de paraître folâtre ; je tentai d’attendrir ces cœurs de marbre et de dérider ces visages sévères par de légères et piquantes saillies ; je tentai d’enjoliver la sinistre réalité par une anecdote badine et joyeuse ; mais j’avais mal calculé mon effet. Ce n’était pas la note, oh ! pas du tout ! Je ne récoltai pas un sourire ; pas un muscle de ces faces crispées ne se détendit ; pas un glaçon de ces regards chargés de banquises ne vint à dégeler. Je tentai de nouveau un pauvre petit