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LETTRE DIX-NEUVIÈME


Libre de toute entrave, à l’abri du remords,
Splendide, s’étalait, rendue à la nature.

De nos dormeuses, l’une aspirait le printemps
De la vie ; elle avait un peu plus de vingt ans.
Était mince, élancée, une adorable blonde :
Des roses dans du lait ; en sourires féconde,
Sa bouche qui s’ouvrait montrait de fraîches dents,
Et comme son bonnet, pris d’humeur vagabonde,

Voletait au hasard, l’or de ses beaux cheveux
Inondait l’oreiller ; sa cuisse ronde et ferme
Promettait au toucher un soyeux épiderme,
Mais la jambe était grêle, et c’est vraiment fâcheux.
Enfin, que voulez-vous ? rien n’est parfait : heureux
Celui qui, prudemment, à ses vœux met un terme.

En revanche, la gorge offrait dans son ampleur
Un roc inébranlable, un inflexible albâtre,
Que sillonnait de bleu mainte veine folâtre ;
Une gorge impossible, à rendre de l’ardeur
À Lazare défunt ; rien qu’à la voir, — horreur ! —
Saint Antoine tenté se fût fait idolâtre.

Notre infante, en un mot, était un vrai morceau
De prince. Maintenant que nous connaissons l’une