croyait triompher, lorsqu’on annonça que le roi d’Ake, son maître et son seul appui, était mort depuis cinq jours. Johnson et sa constitution rentraient forcément dans le néant.
Quand on apprit ce décès, le chef des sorciers se rendit au palais, lava le corps du défunt, lui coupa la langue qu’on fît frire à l’huile de palme et la tête qu’on plaça dans un vase dont on avait retiré le chef blanchi du dernier roi mort. Pour marquer la succession non interrompue des rois d’Ake, on mit sur le corps décapité la tête du prédécesseur. La langue soigneusement gardée dans une écuelle, attend le couronnement du futur roi. Ce jour-là, en effet, le prétendant la mangera en l’assaisonnant de tafia. Alors il régnera ; de là. l’expression usitée dans le pays pour dire que le roi règne : « Il a mangé le roi. Je Oba. »
Le vieux roi d’Ake ne mourut pas seul. Son frère, mandé à la case des ogboni pour rendre compte des suprêmes volontés du défunt, déclara que le monarque avait surtout désiré que l’on fût fidèle à observer les tarifs établis par Johnson. « — Bien entendu, lui fut-il répondu ; mais il faut que quelqu’un se dévoue pour lui porter notre réponse. » Le lendemain, après son souper, ce vieillard mourait subitement, en proie à d’atroces douleurs d’entrailles.