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DESCRIPTION DE TABLEAUX

PAR

PHILOSTRATE L’ANCIEN




AVANT-PROPOS


Ne pas aimer la peinture, c’est mépriser la réalité même, c’est mépriser ce genre de mérite que nous rencontrons chez les poètes, car la peinture, comme la poésie, se complait à nous représenter les traits et les actions des héros ; c’est aussi n’avoir point d’estime pour la science des proportions, par laquelle l’art se rattache à l’usage même de la raison. Si l’on voulait parler avec subtilité, on dirait que la peinture est une invention des dieux, en songeant aux différents aspects de la terre dont les prairies sont comme peintes par les saisons, et à tout ce que nous voyons dans le ciel. Mais, pour remonter sérieusement à l’origine de l’art, l’imitation est une invention des plus anciennes, du même âge que la nature elle-même. Nous en devons la découverte à des hommes habiles qui l’appelèrent tantôt peinture et tantôt plastique. La plastique même se divise en plusieurs genres : car, imiter avec l’airain, polir le Lygdos ou le Paros, travailler l’ivoire, tout cela rentre dans la plastique, sans compter l’art de graver sur métaux. La peinture consiste dans l’emploi des couleurs, mais non en cela seul, ou plutôt de cet unique moyen elle tire un plus grand parti qu’un autre art de ressources nombreuses. En effet, elle représente les ombres, elle varie l’expression des regards, suivant qu’elle nous