Page:Une page d'histoire (éd. Lemerre, 1886).djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Deux autres, qui m’ont apparu aussi, cette année, à la distance de trois siècles d’histoire, et qui se sont enfoncés en moi, comme si je les avais connus, substances vivantes, créatures de chair visibles, qu’il faut toucher des yeux et des mains pour être sûr qu’elles ont existé dans les conditions de cette vie maudite, où les corps ne sont pas transparents et où les êtres que nous avons le plus aimés n’ont plus de nous que l’étreinte de nos rêves et doivent éternellement rester pour nos cœurs un mystère de doute, de regret et de désespoir !… L’histoire de ces deux spectres, qui probablement vont, je le crains bien, se joindre au sombre cortège de ceux-là qui ne me quittent plus ; — cette histoire dont j’ai, en courant, ramassé comme j’ai pu les traces effacées par le temps, la honte et la fin d’une race, et qui s’est attachée à mon âme mordue, comme le taon acharné à la crinière du cheval qui l’emporte, a justement cette fascinante puissance du mystère, la plus grande poésie qu’il y ait pour l’imagination des hommes, — et peut-