Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/421

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Et lors, me mettant un voile sur la teste qui me couvroit jusques aupres des hanches, elle m’accommoda mon manteau par dessous, en telle sorte qu’il estoit mal-aisé de recognoistre la nuict, si c’estoit une robbe. M’ayant ainsi equippé, elle dit à quelques-unes de ses voisines, qui estoient venues avec elle, qu’elle se trouvoit mal, et toutes ensemble s’en allerent demander la clef à la plus vieille de la trouppe, et nous en allans ensemble à la porte avec une petite bougie seulement, qu’elle mesme portoit, et qu’elle couvroit presque toute avec la main, feignant de la conserver du vent, nous sortismes en foule, et j’eschappay ainsi heureusement de ce danger par sa courtoisie. Et pour mieux me déguiser, et aussi que j’avois envie de sçavoir à qui j’avois ceste obligation, je m’en allay parmi les autres jusques à son logis.

Mais, belle bergere, dit-il s’adressant à Diane, ce discours n’est pas encore à moitié, et il me semble que le soleil est couché il y a long temps ; ne seroit-il pas plus à propos d’en remettre la fin à une autre fois que nous aurons plus de loisir ? -Vous avez raison, dit-elle, gentil berger, il ne faut pas desprendre tout son bien à la fois. Ce qui reste à sçauroit arrester ici plus longtemps sans se mettre a la nuict. -Il n’y a rien, dit-il, belle bergere, qui me puisse incommoder quand je suis pres de vous. -Je voudrois bien, respondit-elle, qu’il yeust quelque chose en moy, qui vous fust agreable, car vostre merite et vostre courtoisie oblige chacun à vous rendre toute sorte de service.

Paris vouloit respondre, mais Hylas l’interrompit en luy disant : Pleust à Dieu, gentil Paris, que je fusse vous, et que Diana fust Phillis, et qu’elle me tinst ce