Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/555

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remis ?

Mais où sont les desseins de ce courage extreme,
En mon mal resolu ?
Mais où suis-je moy mesme ?
Je ne me cognois plus.

Mon ame en sa douleur est tellement confuse
Que ce qu’ore elle veut
Soudain elle refuse
Alors qu’elle le peut.

Reduite en cest estat, elle ne peut cognoistre
Qu’elle a, ny quelle elle est :
0 ! pourquoy faut-il estre,
Lorsque tout nous desplaist ?

Diamis qui ne vouloit le surprendre, apres l’avoir quelque temps Escouté, fit du bruit expres à fin qu’il tournast la teste vers luy, et voyant que tout estonné il le regardoit, il s’advança doucement, et apres l’avoir salué, luy dit : Je loue Dieu, mon frere, de ce que je vous ay trouvé si à propos pour vous faire le message que Bellinde vous mande. – Bellinde ? dit-il incontinent, est-il possible qu’elle ayt quelque memoire de moy entre les bras d’Ergaste ? – Ergaste, dit Diamis, n’a point eu Bellinde entre les bras, et j’espere, si vous avez quelque resolution, qu’elle ne sera jamais à luy. – Et doutez-vous, respondit Celion, que la resolution me puisse manquer en un semblable affaire ? – Je voulois dire, repliqua Diamis, de la prudence. – Je pense, respondit Celion, qu’il n’y a point de prudence qui puisse contrevenir à l’ordre que le destin a resolu. Le destin, dit Diamis, ne vous est pas si contraire que vous pensez, et vos affaires ne sont pas en si mauvais termes que vous croyez. Ergaste refuse Bellinde. – Ergaste, dit Celion, la refuse ? – Il est tout certain, continua Diamis, et afin que vous en soyez plusasseuré, Ergaste mesme vous cherche