Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/105

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ne regardent pas plus avant. Et quant aux tournois de nos chevaliers, et des honnestes exercices de ces bergers, l’avoue que les uns sont plus sanglants que les autres; que ceux-là ressentent plus la violence, l’outrage, et le meurtre; mais l’humanité, n’est-ce pas ce qui donne nom à l’homme, et les exercices contraires ne sont-ils pas plus haissables, que ceux qui sont innocens, et sans offence? Ceux-là, et me croyez, Florice, sont plus propres aux ours, aux tigres, et aux lyons, et ceux-cy plus naturels aux hommes qui se doivent conserver, et non pas s’exterminer l’un l’autre. Et quant à la reproche que vous me faites, qu’en [58/59] prenant cet habit de bergere, j’en ay pris l’espri et le courage, plust à Dieu que cela fust, je vivrois pour le moins exempte des peines et des soucis qui tourmentent celles qui vivent dans nostre perpetuelle confusion.

Elle vouloit continuer, lors que Palinice l’interrompit: Ce n’est pas, dit-elle, par cette dispute que nous nous resoudrons de ce que nous avons à faire, il n’est pas question quelle vie est la plus heureuse, mais si nous devons demeurer icy plus longuement pour attendre l’effet de l’oracle qui nous y a amenées. Et me semble que pour en bien juger, nous devons revoir, et bien considerer les paroles, qui ont esté proferées par le dieu; et apres nous bien souvenir de ce que le druide, qui nous les a declarées, nous a dit et ordonné, et afin que nous le puissions mieux faire, lisons l’oracle, car je l’ay escrit, de peur de l’oublier. Et